es levres sans que
mon coeur soit souleve par un degout inexprimable, non peut-etre le
degout d'elle, mais un degout plus haut, plus grand, plus meprisant,
le degout de l'etreinte amoureuse, si vile, qu'elle est devenue, pour
tous les etres affines, un acte honteux qu'il faut cacher, dont on ne
parle qu'a voix basse, en rougissant....
Je ne peux plus voir ma femme venir vers moi, m'appelant du sourire,
du regard et des bras. Je ne peux plus. J'ai cru jadis que son baiser
m'emporterait dans le ciel. Elle fut souffrante, un jour, d'une fievre
passagere, et je sentis dans son haleine le souffle leger, subtil,
presque insaisissable des pourritures humaines. Je fus bouleverse!
Oh! la chair, fumier seduisant et vivant, putrefaction qui marche, qui
pense, qui parle, qui regarde et qui sourit, ou les nourritures
fermentent et qui est rose, jolie, tentante, trompeuse comme l'ame.
Pourquoi les fleurs, seules, sentent-elles si bon, les grandes fleurs
eclatantes ou es, dont les tons, les nuances font fremir mon coeur et
troublent mes yeux. Elles sont si belles, de structures si fines, si
variees et si sensuelles, entr'ouvertes comme des organes, plus
tentantes que des bouches, et creuses avec des levres retournees,
dentelees, charnues, poudrees d'une semence de vie qui, dans chacune,
engendre un parfum different.
Elles se reproduisent, elles, elles seules, au monde, sans souillure
pour leur inviolable race, evaporant autour d'elles l'encens divin de
leur amour, la sueur odorante de leurs caresses, l'essence de leurs
corps incomparables, de leurs corps pares de toutes les graces, de
toutes les elegances, de toutes les formes, qui ont la coquetterie de
toutes les colorations et la seduction enivrante de toutes les
senteurs....
* * * * *
_Fragments choisis, six mois plus tard_
... J'aime les fleurs, non point comme des fleurs, mais comme des
etres materiels et delicieux; je passe mes jours et mes nuits dans les
serres ou je les cache ainsi que les femmes des harems.
Qui connait, hors moi, la douceur, l'affolement, l'extase fremissante,
charnelle, ideale, surhumaine de ces tendresses; et ces baisers sur la
chair rose, sur la chair rouge, sur la chair blanche miraculeusement
differente, delicate, rare, fine, onctueuse des admirables fleurs.
J'ai des serres ou personne ne penetre que moi et celui qui en prend
soin.
J'entre la comme on se glisse en un lieu de plaisir secret. Dans la
ha
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