fait beaucoup pour mon
fils Charles IX.
--Non, madame, dit Maurevert; c'est pour vous ce que j'ai fait...
Catherine demeura pensive devant cette insistance. Elle connaissait
Maurevert pour un des plus mysterieux et des plus terribles serviteurs
qui eussent evolue jadis dans son orbite. Elle savait qu'il ne faisait
rien sans motif.
--Monsieur de Maurevert, reprit-elle tout a coup, ou etiez-vous le jour
des Barricades?
--Je vous comprends, madame, fit Maurevert. J'ai servi le duc de Guise.
Je l'ai servi avec ardeur et fidelite. J'ai fait, pour la reussite de
ses projets, autant que je fis jadis pour la reussite des votres. Depuis
le jour des Barricades, je suis donc un ennemi du roi votre fils et de
vous-meme. Et, si, par hasard, le roi se decidait a faire couper le cou
a M. de Guise, il est sur que je serais, moi, a tout au moins pendu.
C'est bien la la pensee de Votre Majeste?
--Je vois, monsieur de Maurevert, que vous etes toujours tres
intelligent, dit la reine avec un sourire mortel. Mais, enfin, je
suppose que ce n'est pas pour me prouver votre intelligence que vous
m'etes venu trouver?... Que voulez-vous donc? Parlez.
--J'attendais cet ordre de Votre Majeste, dit Maurevert. Voici donc,
madame, ce que je suis venu vous dire. Lorsque nous exterminames les
huguenots, lorsque, pour vous, pour vous seule, je risquai mon sang, ma
vie, non pas une fois, mais dix fois, sans compter, Votre Majeste m'a
fait certaines promesses... J'en ai attendu l'execution pendant dix ans.
Un jour, je me mis sur votre passage, et votre regard me fit comprendre
que j'etais oublie... J'ai tenu a vous dire, madame, pourquoi je me suis
jete dans le parti de la Ligue, pourquoi j'ai tout fait pour soutenir
les pretentions avouees ou secretes de M. de Guise, pourquoi enfin je
suis devenu un ennemi de la fortune des Valois...
--Vraiment, monsieur, vous avez tenu a me dire cela?
--Oui, madame, fit Maurevert avec calme. Et, maintenant que je me suis
soulage. Votre Majeste peut me faire arreter... Mais vous saurez que, si
je vous ai trahie, c'est que vous m'avez trompe, vous!
--Ah! vipere! murmura sourdement la reine... Il faut bien que votre
Guise soit redoutable pour que vous osiez parler ainsi a votre reine! Je
ne vous fais pas arreter... mais je vous chasse!
A ce moment, une voix a la fois grave, humble et caressante se fit
entendre:
--Madame et reine veneree, pardonnez-moi si j'ose m'interposer entre
votre auguste colere
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