lus
dorees, toujours le point de depart est sur terre, comme, quoi qu'on
fasse et ou qu'on aille, la vie reelle est toujours la, avec ses
entraves et ses miseres, qui nous enveloppe, nous importune, nous excite
a mieux, nous ramene a elle, ou nous refoule ailleurs, il est bon de ne
pas l'omettre tout a fait, et de lui donner quelque trace en nos oeuvres
comme elle a trace en nos ames. Il nous semble, en un mot, et pour
revenir a l'objet de cet article, que la touche de Regnier, par exemple,
ne serait point, en beaucoup de cas, inutile pour accompagner, encadrer
et faire saillir certaines analyses de coeurs ou certains poemes de
sentiment, a la maniere d'Andre Chenier.
Aout 1829.
Dans le morceau suivant et en mainte autre occasion j'ai ete ramene a
m'occuper de Chenier: j'avais deja parle de Regnier dans le _Tableau
de la Poesie francaise au XVIe siecle_; j'en ai reparle, non sans
complaisance et apres une nouvelle lecture, dans l'_Introduction_ au
recueil des _Poetes francais_ (Gide, 1861), tome 1, page XXXI.
QUELQUES DOCUMENTS INEDITS SUR ANDRE CHENIER[49]
[Note 49: Cet article, posterieur de dix annees au precedent, acheve
et complete notre vue sur le poete; l'etude approfondie n'a fait que
verifier notre premier ideal.]
Voila tout a l'heure vingt ans que la premiere edition d'Andre Chenier
a paru; depuis ce temps, il semble que tout a ete dit sur lui; sa
reputation est faite; ses oeuvres, lues et relues, n'ont pas seulement
charme, elles ont servi de base a des theories plus ou moins ingenieuses
ou subtiles, qui elles-memes ont deja subi leur epreuve, qui
ont triomphe par un cote vrai et ont ete rabattues aux endroits
contestables. En fait de raisonnement et d'_esthetique_, nous ne
recommencerions donc pas a parler de lui, a ajouter a ce que nous avons
dit ailleurs, a ce que d'autres ont dit mieux que nous. Mais il se
trouve qu'une circonstance favorable nous met a meme d'introduire sur
son compte la seule nouveaute possible, c'est-a-dire quelque chose de
positif.
L'obligeante complaisance et la confiance de son neveu, M. Gabriel de
Chenier, nous ont permis de rechercher et de transcrire ce qui nous a
paru convenable dans le precieux residu de manuscrits qu'il possede;
c'est a lui donc que nous devons d'avoir penetre a fond dans le cabinet
de travail d'Andre, d'etre entre dans cet _atelier du fondeur_ dont il
nous parle, d'avoir explore les ebauches du peintre, et d'en pouvoir
sauver quelques pages
|