ce au livre III). C'est ainsi
que l'on fit tels et tels dogmes, tels et tels dieux... mysteres...
initiations. Le peuple prit au propre ce qui etait dit au figure. C'est
ici qu'il faut traduire une belle comparaison du poete Lucile, conservee
par Lactance (Inst. div., liv. I, ch. xxii):
Ut pueri infantes credunt signa omnia ahena
Vivere et esse homines, sic istic (_pour_ isti) omnia ficta
Vera putant[52]...
Sur quoi le bon Lactance, qui ne pensait pas se faire son proces a
lui-meme, ajoute avec beaucoup de sens, que les enfants sont plus
excusables que les hommes faits: _Illi enim simulacra homines putant
esse, hi Deos_[53]."
[Note 52: Comme les enfants prennent les statues d'airain au serieux
et croient que ce sont des hommes vivants, ainsi les superstitieux
prennent pour verites toutes les chimeres.]
[Note 53: "Car ils ne prennent ces images que pour des hommes, et les
autres les prennent pour des Dieux."--L'opposition entre ces pensees
d'Andre et celles que nous ont laissees Vauvenargues ou Pascal, s'offre
naturellement a l'esprit; lui-meme il n'est pas sans y avoir songe, et
sans s'etre pose l'objection. Je trouve cette note encore: "Mais quoi?
tant de grands hommes ont cru tout cela... Avez-vous plus d'esprit, de
sens, de savoir?... Non; mais voici une source d'erreur bien ordinaire:
beaucoup d'hommes, invinciblement attaches aux prejuges de leur enfance,
mettent leur gloire, leur piete, a prouver aux autres un systeme avant
de se le prouver a eux-memes. Ils disent: Ce systeme, je ne veux point
l'examiner pour moi. Il est vrai, il est incontestable, et, de maniere
ou d'autre, il faut que je le demontre.--Alors, plus ils ont d'esprit,
de penetration, de savoir, plus ils sont habiles a se faire illusion, a
inventer, a unir, a colorer les sophismes, a tordre et defigurer tous
les faits pour en etayer leur echafaudage... Et pour ne citer qu'un
exemple et un grand exemple, il est bien clair que, dans tout ce qui
regarde la metaphysique et la religion, Pascal n'a jamais suivi une
autre methode." Cela est beaucoup moins clair pour nous aujourd'hui que
pour Andre, qui ne voyait Pascal que dans l'atmosphere d'alors, et,
pour ainsi dire, a travers Condorcet.--Dans les fragments de memoires
manuscrits de Chenedolle, qui avait beaucoup vecu avec des amis de notre
poete, je trouve cette note isolee et sans autre explication: "Andre
Chenier etait athee avec delices."]
Ce second chant devait renfermer, du ton lug
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