t heures a la
campagne et se trouva le troisieme soir a la porte de Therese, juste en
meme temps que M. Richard Palmer.
--Oh! dit l'Americain en lui tendant la main, je suis content de voir
vous!
Laurent ne put se dispenser de tendre aussi la main; mais il ne put
s'empecher de demander a M. Palmer pourquoi il etait si content de le
voir.
L'etranger ne fit aucune attention au ton passablement impertinent de
l'artiste.
--Je suis content parce que j'aime vous, reprit-il avec une cordialite
irresistible, et j'aime vous, parce que j'admire vous beaucoup!
--Comment! vous voila? dit Therese etonnee a Laurent. Je ne comptais plus
sur vous ce soir.
Et il sembla au jeune homme qu'il y avait un accent de froideur inusite
dans ces simples paroles.
--Ah! lui repondit-il tout bas, vous en eussiez pris facilement votre
parti, et je crois que je viens troubler un delicieux tete-a-tete.
--C'est d'autant plus cruel a vous, reprit-elle sur le meme ton enjoue,
que vous sembliez vouloir me le menager.
--Vous y comptiez, puisque vous ne l'aviez pas decommande! Dois-je m'en
aller?
--Non, restez. Je me resigne a vous supporter.
L'Americain, apres avoir salue Therese, avait ouvert son portefeuille et
cherche une lettre qu'il etait charge de lui remettre. Therese parcourut
cette lettre d'un air impassible, sans faire la moindre reflexion.
--Si voulez repondre, dit Palmer, j'ai une occasion pour La Havane.
--Merci, repondit Therese en ouvrant le tiroir d'un petit meuble qui etait
sous sa main, je ne repondrai pas.
Laurent, qui suivait tous ses mouvements, la vit mettre cette lettre avec
plusieurs autres, dont l'une, par la forme et la suscription, lui sauta
pour ainsi dire aux yeux. C'etait celle qu'il avait ecrite a Therese
l'avant-veille. Je ne sais pourquoi il fut choque interieurement de voir
cette lettre en compagnie de celle que venait de remettre M. Palmer.
--Elle me laisse la, dit-il, pele-mele avec ses amants evinces. Je n'ai
pourtant pas droit a cet honneur. Je ne lui ai jamais parle d'amour.
Therese se mit a parler du portrait de M. Palmer. Laurent se fit prier,
epiant les moindres regards et les moindres inflexions de voix de ses
interlocuteurs, et s'imaginant a chaque instant decouvrir en eux une
crainte secrete de le voir ceder; mais leur insistance etait de si bonne
foi, qu'il s'apaisa et se reprocha ses soupcons. Si Therese avait des
relations avec cet etranger, libre et seule comme elle vivait,
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