giner avec quel interet mele de surprise j'ecoutai cette
histoire. Elle etait d'ailleurs de nature a m'interesser a plus d'un
titre. D'abord la rencontre de Baptiste que j'avais double plaisir a
revoir puisque je le connaissais depuis nombre d'annees et que c'etait
le meme qui enfant, etait, venu nous demander asile. En l'absence de
Paulo, il etait le commensal le plus assidu de ma cabane.
Angeline lui avait voue une amitie toute fraternelle. Elle lui
avait meme donne des lecons de lecture et d'ecriture qui avaient
considerablement developpe son intelligence deja remarquable. Aussi le
pauvre orphelin, peu habitue aux bons procedes, la traitait-il avec une
deference et un amour tout filial, bien qu'elle n'eut que peu d'annees
de plus que lui. C'etait elle, la chere ange, qui l'avait engage a
prendre du service a bord de _La Brise_ pour me porter secours au
besoin. Ces derniers details, je les ignorais entierement.
J'etais doublement heureux de la rencontre de Baptiste. Bien que j'eusse
la certitude que je ne m'etais pas trompe sur les scelerats qui avaient
commis les actes de brigandage a Ste. Anne, j'allais cependant eclaircir
tous mes soupcons, car Baptiste connaissait parfaitement Paulo; aussi
m'empressai-je de sortir de ma cachette.
Malgre le peu de bruit que je fis, l'oreille exercee des trappeurs les
avertit de l'approche d'un etranger. Croyant a une attaque subite, il
disparurent derriere les arbres et je vis briller a la lueur du feu les
canons de trois carabines. J'elevai la voix et continuai a avancer en
disant: Est-ce que par hasard trois hommes jeunes et vigoureux comme
vous l'etes auriez peur d'un compagnon chasseur? Je m'approchai
completement desarme jusqu'aupres du feu.
A ma vue, Baptiste laissa tomber son fusil, puis la bouche ouverte,
l'oeil fixe, il me contempla un instant avec un etonnement indicible.
D'un saut, il fut aupres de moi, m'embrassa les mains, fit mille
contorsions, mille gambades, tant etait delirante la joie qu'il
eprouvait de me revoir. Ses autres compagnons le regardaient faire avec
une surprise et un ebahissement non moins grand. Sans nul doute, ils
crurent que leur chef devenait fou a lier.
Lorsqu'ils eurent repris leurs sens et que Baptiste leur eut donne
quelques explications, il me fallut repondre aux pressantes questions
de Baptiste qui me demandait des informations sur mon sort et celui
d'Angeline.
Je lui racontai mon temps d'esclavage, mon evasion et les derniers
m
|