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profonde, et en Europe un melange d'etonnement et d'indignation. Comme
l'avaient prevu les revolutionnaires les plus clairvoyans, la lutte se
trouvait engagee sans retour, et toute retraite etait irrevocablement
fermee. Il fallait donc combattre la coalition des trones, et la vaincre
ou perir sous ses coups. Aussi, dans l'assemblee, aux Jacobins, partout,
on disait qu'on devait s'occuper uniquement de la defense exterieure, et
des cet instant les questions de guerre et de finances furent constamment
a l'ordre du jour.
On a vu quelle crainte s'inspiraient l'un a l'autre les deux partis
interieurs. Les jacobins croyaient voir un dangereux reste de royalisme
dans cette resistance opposee a la condamnation de Louis XVI, et dans
cette horreur qu'inspiraient a beaucoup de departemens les exces commis
depuis le 10 aout. Aussi douterent-ils de leur victoire jusqu'au dernier
moment; mais la facile execution du 21 janvier les avait enfin rassures.
Depuis lors ils commencaient a croire que la cause de la revolution
pouvait etre sauvee, et ils preparaient des adresses pour eclairer les
departemens, et achever leur conversion. Les girondins, au contraire, deja
touches du sort de la victime, et alarmes en outre de la victoire de leurs
adversaires, commencaient a decouvrir dans l'evenement du 21 janvier le
prelude de longues et sanglantes fureurs, et le premier fait du systeme
inexorable qu'ils combattaient. On leur avait bien accorde la poursuite
des auteurs de septembre, mais c'etait la une concession sans resultat. En
abandonnant Louis XVI, ils avaient voulu prouver qu'ils n'etaient pas
royalistes; en leur abandonnant les septembriseurs, on voulait leur
prouver qu'on ne protegeait pas le crime; mais cette double preuve n'avait
satisfait ni rassure personne. On voyait toujours en eux de faibles
republicains et presque des royalistes, et ils voyaient toujours dans
leurs adversaires des ennemis alteres de sang et de carnage. Roland,
completement decourage, non par le danger, mais par l'impossibilite
manifeste d'etre utile, donna sa demission le 23 janvier. Les jacobins
s'en applaudirent, mais s'ecrierent aussitot qu'il restait encore au
ministere les traitres Claviere et Lebrun, dont l'intrigant Brissot
s'etait rendu maitre; que le mal n'etait pas entierement detruit; qu'il ne
fallait pas se ralentir, mais au contraire redoubler de zele jusqu'a ce
qu'on eut ecarte du gouvernement les _intrigans_, les _girondins_, les
_rolandins_
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