l'usage ordinaire dans tous les
mouvemens, couraient pour faire fermer les barrieres.
Dans ce meme instant, les cris d'une populace furieuse retentissaient dans
les rues; les enroles qui avaient dine a la Halle-aux-Bles, remplis de
fureur et de vin, munis de pistolets et de sabres, s'avancaient vers la
salle des Jacobins, en faisant entendre des chants epouvantables. Ils y
arrivaient a l'instant meme ou Bentabole achevait son rapport sur la
seance de la journee. Parvenus a la porte, ils demandent a defiler dans la
salle. Ils la traversent au milieu des applaudissemens. L'un d'eux prend
la parole et dit: "Citoyens, au moment du danger de la patrie, les
vainqueurs du 10 aout se levent pour exterminer les ennemis de l'exterieur
et de l'interieur.--Oui, leur repond le president Collot-d'Herbois, malgre
les intrigans, nous sauverons avec vous la liberte." Desfieux prend alors
la parole, dit que Miranda est la creature de Petion, et qu'il trahit; que
Brissot a fait declarer la guerre a l'Angleterre pour perdre la France. Il
n'y a qu'un moyen, ajoute-t-il, de se sauver, c'est de se debarrasser de
tous ces traitres, de mettre tous les _appelans_ en etat d'arrestation
chez eux, et de faire nommer d'autres deputes par le peuple." Un homme
vetu d'un habit militaire, et sorti de la foule qui venait de defiler,
soutient que ce n'est pas assez que l'arrestation, et qu'il faut des
vengeances. "Qu'est-ce que l'inviolabilite? dit-il. Je la mets sous les
pieds..." A ces mots, Dubois de Crance arrive, et veut s'opposer a ces
propositions. Sa resistance cause un tumulte affreux. On propose de se
diviser en deux colonnes, dont l'une ira chercher les freres cordeliers,
et l'autre se rendra a la convention pour defiler dans la salle, et lui
faire entendre tout ce qu'on exige d'elle. On hesite a decider le depart,
mais les tribunes envahissent la salle, on eteint les lumieres, les
agitateurs l'emportent, et on se divise en deux corps pour se rendre a la
convention et aux Cordeliers.
Dans ce moment, l'epouse de Louvet, logee avec lui dans la rue
Saint-Honore, pres des Jacobins, avait entendu les vociferations partant
de cette salle, et s'y etait rendue pour s'instruire de ce qui s'y
passait. Elle assiste a cette scene; elle accourt en avertir Louvet, qui
avec beaucoup d'autres membres du cote droit, avait quitte la seance de la
convention, ou l'on disait qu'ils devaient etre assassines. Louvet, arme
comme on l'etait ordinairement, profite de
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