coeur, monsieur, vous n'etes point fache?
-- Pas du tout. Pourquoi serais-je fache de ce qui vous fait
plaisir?
-- Ah! monsieur, que vous etes bon! s'ecria le jeune homme faisant
un mouvement pour sauter au cou d'Athos, mais le respect l'arreta.
Athos lui ouvrit ses bras.
-- Ainsi je puis partir tout de suite?
-- Quand vous voudrez, Raoul.
Raoul fit trois pas pour sortir.
-- Monsieur, dit-il, j'ai pense a une chose, c'est que c'est a
madame la duchesse de Chevreuse, si bonne pour moi, que j'ai du
mon introduction pres de M. le Prince.
-- Et que vous lui devez un remerciement, n'est-ce pas, Raoul?
-- Mais il me semble, monsieur; cependant c'est a vous de decider.
-- Passez par l'hotel de Luynes, Raoul, et faites demander si
madame la duchesse peut vous recevoir. Je vois avec plaisir que
vous n'oubliez pas les convenances. Vous prendrez Grimaud et
Olivain.
-- Tous deux, monsieur? demanda Raoul avec etonnement.
Raoul salua et sortit.
En lui regardant fermer la porte et en l'ecoutant appeler de sa
voix joyeuse et vibrante Grimaud et Olivain, Athos soupira.
-- C'est bien vite me quitter, pensa-t-il en secouant la tete;
mais il obeit a la loi commune. La nature est ainsi faite, elle
regarde en avant. Decidement il aime cette enfant; mais m'aimera-
t-il moins pour en aimer d'autres?
Et Athos s'avoua qu'il ne s'attendait point a ce prompt depart;
mais Raoul etait si heureux que tout s'effaca dans l'esprit
d'Athos devant cette consideration.
A dix heures tout etait pret pour le depart. Comme Athos regardait
Raoul monter a cheval, un laquais le vint saluer de la part de
madame de Chevreuse. Il etait charge de dire au comte de La Fere
qu'elle avait appris le retour de son jeune protege, ainsi que la
conduite qu'il avait tenue a la bataille et qu'elle serait fort
aise de lui faire ses felicitations.
-- Dites a madame la duchesse, repondit Athos, que M. le vicomte
montait a cheval pour se rendre a l'hotel de Luynes.
Puis, apres avoir fait de nouvelles recommandations a Grimaud,
Athos fit de la main signe a Raoul qu'il pouvait partir.
Au reste, en y reflechissant, Athos songeait qu'il n'y avait point
de mal peut-etre a ce que Raoul s'eloignat de Paris en ce moment.
XLV. Encore une reine qui demande secours
Athos avait envoye prevenir Aramis des le matin et avait donne sa
lettre a Blaisois, seul serviteur qui lui fut reste. Blaisois
trouva Bazin revetant sa robe de bedeau; il etait c
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