e j'ai trouve monte sur un
singulier ton a mon egard.
-- Fi donc! une querelle entre pretres! un duel entre allies!
-- Que voulez-vous, mon cher! il est ferrailleur, et moi aussi; il
court les ruelles, et moi aussi; sa soutane lui pese, et j'ai, je
crois, assez de la mienne; je crois parfois qu'il est Aramis et
que je suis le coadjuteur, tant nous avons d'analogie l'un avec
l'autre. Cette espece de Sosie m'ennuie et me fait ombre;
d'ailleurs, c'est un brouillon qui perdra notre parti. Je suis
convaincu que si je lui donnais un soufflet, comme j'ai fait ce
matin a ce petit bourgeois qui m'avait eclabousse, cela changerait
la face des affaires.
-- Et moi, mon cher Aramis, repondit tranquillement Athos, je
crois que cela ne changerait que la face de M. de Retz. Ainsi,
croyez-moi, laissons les choses comme elles sont: d'ailleurs, vous
ne vous appartenez plus ni l'un ni l'autre: vous etes a la reine
d'Angleterre et lui a la Fronde; donc, si la seconde chose que
vous regrettez de ne pouvoir accomplir n'est pas plus importante
que la premiere...
-- Oh! celle-la etait fort importante.
-- Alors faites-la tout de suite.
-- Malheureusement je ne suis pas libre de la faire a l'heure que
je veux. C'etait au soir, tout a fait au soir.
-- Je comprends, dit Athos en souriant, a minuit?
-- A peu pres.
-- Que voulez-vous, mon cher, ce sont choses qui se remettent, que
ces choses-la, et vous la remettrez, ayant surtout une pareille
excuse a donner a votre retour...
-- Oui, si je reviens.
-- Si vous ne revenez pas, que vous importe? Soyez donc un peu
raisonnable. Voyons, Aramis, vous n'avez plus vingt ans, mon cher
ami.
-- A mon grand regret, mordieu! Ah! si je les avais!
-- Oui, dit Athos, je crois que vous feriez de bonnes folies! Mais
il faut que nous nous quittions: j'ai, moi, une ou deux visites a
faire et une lettre a ecrire; revenez donc me prendre a huit
heures, ou plutot voulez-vous que je vous attende a souper a sept?
-- Fort bien; j'ai, moi, dit Aramis, vingt visites a faire et
autant de lettres a ecrire.
Et sur ce ils se quitterent. Athos alla faire une visite a madame
de Vendome, deposa son nom chez madame de Chevreuse, et ecrivit a
d'Artagnan la lettre suivante:
"Cher ami, je pars avec Aramis pour une affaire d'importance. Je
voudrais vous faire mes adieux, mais le temps me manque. N'oubliez
pas que je vous ecris pour vous repeter combien je vous aime.
"Raoul est alle a Blois, et il i
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