na, ou les vivres epuises, il fallut se rendre.
Trois jours durant, les Prussiens camperent dans les Champs-Elysees,
devorant du regard cette ville, l'objet de leurs ardentes convoitises,
ce Paris ou tout victorieux qu'ils etaient, ils n'avaient pas ose
s'aventurer.
Puis les communications furent retablies, et un matin, en recevant une
lettre de Suisse:
--C'est du baron de Thaller! s'ecria M. Favoral.
Precisement, le directeur du _Credit mutuel_ etait un homme prudent.
Agreablement installe en Suisse, il ne s'y deplaisait pas, et avant de
rentrer a Paris, il tenait a se bien assurer qu'il n'y courrait aucuns
risques...
Sur les assurances que lui donna M. Favoral, il se mit en route, et
presque en meme temps que lui, reparurent l'aine des MM. Jottras et M.
Costeclar.
XIX
C'etait un curieux spectacle que le retour de ces braves, pour qui
on avait enrichi la langue verte du significatif vocable de
"franc-fileur."
Ils n'etaient pas si fiers qu'on les a vus depuis.
Assez embarrasses de leur contenance au milieu d'une population toute
fremissante encore des emotions du siege, ils avaient le bon gout de
chercher des pretextes a leur absence.
--J'ai ete coupe, affirmait le baron de Thaller. J'etais alle en
Suisse, mettre en surete ma femme et ma fille; quand j'ai voulu
rentrer, bonsoir! les Prussiens avaient ferme les portes. Pendant plus
de huit jours, j'ai erre autour de Paris, cherchant une issue, je n'y
ai rien gagne que d'etre soupconne d'espionnage, arrete, et pour un
peu plus, on me fusillait net.
--Moi, declarait M. Costeclar, je prevoyais ce qui est arrive. Je
savais que c'etait au dehors, pour organiser des armees de secours,
qu'il faudrait des hommes. Je suis alle offrir mes services au
gouvernement de la Defense, et tout Bordeaux a pu me voir botte,
eperonne, pret a partir...
Et en consequence, il sollicitait la croix, et ne desesperait pas de
l'obtenir, par la toute-puissance de ses relations financieres.
--Un tel l'a bien obtenue, repondait-il aux objections. Et il nommait
celui-ci ou cet autre, dont les faits d'armes se bornaient a s'etre
promene au soleil, galonne jusqu'aux epaules.
--Mais c'est moi qui la meriterais, cette croix, soutenait M. Jottras
jeune, car moi, du moins, j'ai rendu des services.
Et il racontait qu'apres avoir fouille toute l'Angleterre pour y
decouvrir des armes, il s'etait embarque pour New-York ou il avait
achete des masses de fusils et de cart
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