orsqu'un parti est a son debut, qu'il a
tous ses chefs, que le succes et la nouveaute entrainent les masses a sa
suite, qu'il deconcerte ses adversaires par l'audace de ses attaques, il
supplee a l'ensemble, a l'ordre, par l'entrainement: au contraire,
lorsqu'il est une fois reduit a se defendre, qu'il est prive
d'impulsion, connu de ses adversaires, il aurait plus que jamais besoin
de la discipline. Mais cette discipline, presque toujours impossible, le
devient tout a fait lorsque les chefs influens ont disparu. Telle etait
la position du parti patriote en ventose an III (fin mars): ce n'etait
plus le torrent du 14 juillet, des 5 et 6 octobre, du 10 aout, du 31
mai; c'etait la reunion de quelques hommes aguerris par de longues
discordes, serieusement compromis, pleins d'energie et d'opiniatrete,
mais plus capables de combattre avec desespoir que de vaincre.
Suivant l'ancienne coutume de faire preceder tout mouvement par une
petition imperieuse et pourtant mesuree, les sections de Montreuil et
des Quinze-Vingts, compromises dans le faubourg Antoine, en redigerent
une analogue a toutes celles qui avaient ete faites avant les grandes
insurrections. Il fut convenu qu'elle serait presentee le 1er germinal
(21 mars). C'etait ce jour meme que les comites avaient resolu de
proposer la loi de grande police, imaginee par Sieyes. Outre la
deputation qui devait presenter la petition, une reunion de patriotes
avait eu soin de se rendre vers les Tuileries; ils y etaient accourus en
foule, et, comme de coutume, ils formaient des groupes nombreux dont le
cri etait: _Vive la convention! vive les jacobins! a bas les
aristocrates!_ Les jeunes gens a cheveux retrousses, a collet noir,
avaient deborde aussi du Palais-Royal aux Tuileries, et formaient des
groupes opposes criant: _Vive la convention! a bas les terroristes!_ Les
petitionnaires furent introduits a la barre: le langage de leur petition
etait extremement mesure. Ils rappelerent les souffrances du peuple,
sans y mettre aucune amertume; ils combattirent les accusations dirigees
contre les patriotes, sans recriminer contre leurs adversaires. Ils
firent remarquer seulement que, dans ces accusations, on meconnaissait
et les services passes des patriotes, et la position dans laquelle ils
s'etaient trouves; ils avouerent, du reste, que des exces avaient ete
commis, mais en ajoutant que les partis, quels qu'ils fussent, etaient
composes par des hommes, et non par des dieux. "Les section
|