pour
qu'elle ne le refusat pas, c'est-a-dire qu'adoptant l'idee du vieux
notaire, on l'acheterait.
Mais ou etait-il, le mari digne de ce choix?
Celui qu'elle pouvait aimer?
Celui qui la protegerait et qui assurerait son bonheur?
Car cette necessite d'un mariage immediat, determinante pour lui,
grand-pere, ne serait d'aucun poids sur une jeune fille de dix-huit ans
telle que Berengere. Assurement, ce ne serait pas parce qu'il faudrait
qu'elle se mariat qu'elle accepterait un mari; ce serait parce qu'elle
aimerait l'homme qu'on lui proposerait.
Et quel homme pouvait-elle aimer? Un seul: Richard de Gardilane.
C'etait ainsi que M. de la Roche-Odon avait ete, par la seule force des
circonstances, ramene au capitaine, et dans des conditions telles, qu'il
devait souhaiter maintenant que le capitaine aimat sa petite-fille et
que celle-ci aimat le capitaine.
Une seule chose restait inquietante: la religion du capitaine.
Et cette inconnue, il fallait maintenant l'examiner au plus vite.
XXI
C'etait chose assez delicate pour M. de la Roche-Odon que d'aller
confesser M. de Gardilane.
Heureusement il avait pris en ces derniers temps l'habitude de faire au
capitaine de frequentes visites, soit chez lui, soit a son bureau des
casernes; et par la se trouvait epargne l'embarras de se presenter de
but en blanc sans avoir une raison ou un pretexte.
De raison ou de pretexte, il n'en avait pas besoin; il venait comme a
l'ordinaire, pour rien, pour le plaisir.
Il ne lui fallait qu'une occasion.
Mais il en etait de lui comme des amants jeunes et timides qui ne
trouvent jamais bonne l'occasion qui se presente, tant ils ont peur de
perdre la femme qu'ils aiment passionnement. Cette occasion, ils n'osent
la faire naitre, il faut qu'elle s'impose a eux, et encore bien souvent
la repoussent-ils.
Ce fut ainsi qu'il alla trois ou quatre fois chez le capitaine,
parfaitement decide a parler en quittant la Rouvraye, et cependant
revenant a la Rouvraye sans avoir rien dit de ce qu'il avait
laborieusement prepare, ingenieusement combine, savamment arrange.
En route, il disposait son plan: il disait ceci, et puis cela; c'etait
bien simple; le capitaine serait force de repondre; il prevoyait ses
repliques.
Il arrivait brave et decide:
--Bonjour, mon cher ami.
Le capitaine s'inclinait.
--J'ai voulu vous voir pour...
Le capitaine fixait sur lui son regard clair et franc.
Et justement la franchise de ce
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