tretien avait mieux
tourne qu'il ne l'avait cru en l'engageant.
Sans doute il etait desole de la confession du capitaine.
Mais enfin, lorsqu'il avait decide de risquer cet interrogatoire,
il avait craint des reponses plus mauvaises que celles qu'il avait
obtenues.
Si le capitaine ne croyait pas, il n'etait nullement prouve qu'il ne
croirait pas un jour.
Entraine par les exigences de la vie, il avait oublie les principes
religieux de sa jeunesse.
D'ailleurs, par quelle instruction avaient-ils ete developpes, ces
principes? Par celle qu'on recoit dans les colleges. Et justement le
comte n'avait aucune confiance dans cette instruction; n'avait-il
pas entendu dire sur tous les tons que l'universite ne fait que des
incredules ou des indifferents? Ce resultat avait ete obtenu pour M.
de Gardilane, qui ne se trouvait pas ainsi tout a fait responsable de
l'etat present de sa conscience.
Le college avait commence l'indifference, le monde, les mauvais
exemples, les mauvaises lectures l'avaient achevee.
C'etait la marche ordinaire des choses, mais elle ne l'avait pas
conduit, comme cela arrive trop souvent, jusqu'a l'irreligion et
l'incredulite absolues.
Il avait dit, a la verite, un mot bien grave sur la religion chretienne,
"qui, telle qu'elle est demeuree, se trouve en lutte avec la societe
telle que celle-ci est devenue."
Mais il ne fallait pas attacher trop d'importance a cette parole,
puisque justement il ne savait pas ce qu'etait cette religion dont il
parlait legerement.
Au fond de l'ame se trouvait le sentiment religieux, et pour le moment
cela suffisait; lorsque ce sentiment serait developpe par l'instruction,
il arriverait tout naturellement au catholicisme: il ne pouvait pas en
etre autrement.
Au moins telle etait la conviction de M. de la Roche-Odon.
D'ailleurs il comptait sur un auxiliaire tout-puissant dans la tache
qu'il assumait--l'amour.
Si le capitaine n'avait pas vu le but auquel tendait le comte, il le
verrait certainement un jour, et alors il comprendrait comment il
pouvait obtenir Berengere.
Ce jour-la l'indifference serait vaincue, et si l'instruction etait
alors assez avancee, la conversion se produirait immediatement, non
par interet, mais par elan sympathique, par communaute d'idees, par ce
sentiment qui est l'essence meme de l'amour et qui fait que nous voyons
ce que voit la personne aimee, que nous croyons ce qu'elle croit, que
nous aimons ce qu'elle aime.
Les esper
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