te de son grand-pere,
c'est-a-dire sa vie meme, le debarrassant de toutes ces craintes, de
toutes ces precautions qu'il s'imposait ou dont il souffrait depuis si
longtemps.
Il etait donc tout naturel que les choses etant ainsi, il eut voulu
convertir Richard qu'il acceptait pour gendre sous cette seule condition
de conversion.
Richard se convertirait-il?
Pas plus que son grand-pere elle ne savait quelles etaient les idees
religieuses de Richard.
Etait-il indifferent, etait-il incredule? elle l'ignorait, n'ayant
jamais pense a cela jusqu'a ce jour, et ne s'etant pas demande, quand
elle avait commence a l'aimer: est-il ou n'est-il pas chretien?
grand-papa l'acceptera-t-il ou le refusera-t-il?
Mais maintenant cette question qui ne s'etait pas presentee a son
esprit, devait etre resolue.
Elle etait capitale et c'etait elle qui allait decider leur vie a tous.
--Il m'aime, se dit-elle, il pensera comme je pense; je crois, il
croira; n'est-ce pas la cette union des pensees comme des sentiments qui
est l'amour?
Et en raisonnant, en calculant ainsi, elle se sentait pleine de
confiance.
Elle n'en etait pas en effet a douter comme le capitaine, et tandis que
celui-ci se demandait avec une entiere bonne foi: "M'aime-t-elle?" elle
se disait avec une entiere assurance: "Il m'aime."
Jamais cependant une parole d'amour n'avait ete echangee entre eux,
jamais un serrement de main n'avait indique ce que les levres n'osaient
pas prononcer.
Mais est-ce qu'une femme, est-ce qu'une jeune fille, meme la plus
innocente et la plus candide, a besoin de paroles precises ou de
caresses materielles pour savoir qu'elle est aimee?
En cherchant dans sa tete un seul mot qui affirmat l'amour de Richard,
Berengere ne l'eut pas trouve; mais sans chercher elle sentait dans son
coeur mille temoignages de cet amour plus frappants, plus eblouissants,
plus enivrants les uns que les autres.
Il l'aimait, donc il penserait, il sentirait, il croirait comme elle.
C'etait ainsi au moins que dans son assurance enfantine elle comprenait
l'amour, n'admettant pas une seconde qu'il put y avoir doute a cet
egard.
Seulement pour qu'il repondit a son grand-pere dans le sens que celui-ci
desirait, il fallait qu'il fut prevenu.
En effet, s'il ignorait dans quelle intention M. de la Roche-Odon avait
entrepris sa conversion, il pouvait tres-bien arriver qu'il ne pretat
qu'une oreille distraite aux exhortations qu'on lui adresserait; il
etai
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