e ses deux mains
pour ne plus voir ces yeux qui l'attiraient irresistiblement.
--Vous voyez donc bien que je parle serieusement, dit-elle.
Il balbutia quelques mots qu'elle n'entendit point.
Alors elle attendit un moment, puis elle poursuivit:
--Puisque vous etes mon confident, il faut que je vous dise qui j'ai
choisi; je m'etais imagine, en prenant cette resolution, que je n'aurais
pas cet aveu a vous faire, mais je vois que vous etes si peu brave que
vous ne me viendriez pas en aide. C'est...
Cette fois il ne fut plus maitre de lui, et tendant les deux bras vers
elle, il s'ecria:
--Berengere, chere Berengere!
--Richard, oui, Richard, c'est Richard.
Et, cedant a son emotion, elle se laissa aller vers lui et se coucha la
tete sur sa poitrine.
Il l'avait prise dans ses bras et, penche sur elle, le visage enfonce
dans ses cheveux, il la serrait passionnement.
Enfin Richard ayant denoue ses bras pour lui relever la tete et la
regarder, elle se degagea et se redressa.
Alors il se laissa glisser a ses genoux, et, lui prenant les deux mains,
relevant la tete et la haussant de maniere a effleurer presque son
visage:
--Ah! chere Berengere, dit-il, laissez-moi vous regarder ainsi, ces
beaux yeux dans les miens.
Elle le regarda comme il le demandait; puis, avec un sourire:
--Alors vous ne me connaissez pas encore? dit-elle.
--Mademoiselle de la Roche-Odon? oui, je la connais; mais celle que je
regarde en ce moment, celle que j'admire, celle que j'adore a genoux,
c'est ma femme, ma chere petite femme.
--Oh! Richard, mon Richard bien-aime!
Il est des heures dans la vie ou les yeux parlent un langage plus
eloquent, plus passionne que les levres, ou les mots sont inutiles et
ou, dans leur forme materielle, ils ont meme quelque chose d'incomplet
pour traduire des sentiments qui n'ont rien de materiel.
Pendant longtemps ils resterent ainsi perdus, ravis dans une muette
extase.
Ce qu'ils avaient a se dire, ils l'avaient dit.
Ils s'aimaient.
Et c'etait sa femme qu'il tenait dans ses bras.
Cependant il vint un moment ou cette pensee fut emportee dans les
mouvements tumultueux de sa passion, alors de peur de se laisser
entrainer, il voulut prendre la parole.
--Ainsi vous m'aimez!
--Il a fallu vous le dire, puisque, vous mettiez tant de mauvaise
volonte a me comprendre.
--Ah! Berengere.
--Il parait que ce qui etait difficile a dire pour vous, devait etre
facile pour moi.
--Pou
|