tatra!
C'en est fait du _Jean-Bart_, une branche s'est enfoncee dans l'appendice,
et l'a creve comme une peau de tambour! Tout est perdu! pensons-nous.
Nous ramenons le ballon a terre, nous voyons avec joie qu'il n'en est
heureusement pas ainsi: l'avarie peut se reparer. L'appendice seul est
creve. Jossec monte dans le cercle, et de son cache-nez, etrangle le
ballon au-dessus du cercle de l'appendice.--Nous l'aidons dans ce travail
difficile, car perches dans le cercle, et les mains levees, nous touchons
a peine la partie malade de l'aerostat. Il faut faire une ligature a bras
tendu, pendant que le vent nous balance, et nous jette dans les cordages,
tantot sur le dos, tantot a plat ventre. En nous soutenant mutuellement,
nous cicatrisons la plaie du _Jean-Bart_. Jossec qui sait ce que c'est
qu'une voie d'eau dans un navire, a appris qu'une voie de gaz ouverte dans
un aerostat n'est pas moins dangereuse. Mais il a su reparer celle-ci
en habile aeronaute; il est excellent gabier, et la navigation aerienne
touche en bien des points a la navigation oceanique.
L'air est agite, et le vent augmente d'intensite. Les rafales sifflent, et
font bondir le ballon qu'elles ont deja en partie degonfle. L'etoffe n'est
plus aussi bien tendue, elle se creuse par moment, en faisant entendre un
bruit sourd et lugubre.--Il faut attendre que la tourmente ait passe.
Car le transport devient actuellement impossible. Nous postons quatre
factionnaires autour du _Jean-Bart_, et nous allons jusqu'au village de
Chanteau, ou nous prenons un modeste repas que nous avons tous bien gagne.
On remplit de vin deux seaux, et nos moblots y puisent a tour de role.
Cette collation ranime leur ardeur. Ils trouvent que, decidement, il y a
du bon dans le service des ballons captifs.
En depit du vent, nous nous decidons a continuer notre route, car nous
voulons arriver au camp de Chilleur. Nous savons que le general d'Aurelles
n'est pas bien convaincu de l'utilite des ballons captifs; que dira-t-il
si ses premiers ordres n'ont pu etre executes pour cause de vent?
Qu'importent les obstacles imprevus, l'insuffisance d'un materiel
improvise, les difficultes dues a la mauvaise saison? Expliquer toutes ces
bonnes raisons quand on a echoue, c'est perdre son temps. Il faut reussir
a tout prix. Un general vaincu est un mauvais soldat. Un ballon dans une
premiere tentative a ete creve. Supprimons les ballons. Voila comme on
juge aujourd'hui. Nous ne l'ignorons pas, auss
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