ntimes a un paysan. Ce brave homme s'est excuse
de le faire payer un peu cher. Mais les temps sont durs. Helas! A trente
lieues d'ici, dans les murs de Paris, ce lapin couterait a nos amis autant
de pieces de cinq francs que nous l'avons paye de sous!
A 11 heures, le bruit de la canonnade se rapproche singulierement, des
paysans accourent consternes! Les obus, disent-ils, tombent a 1000 metres
d'ici.
Qu'allons-nous devenir? L'equipe est vite rassemblee, il faut faire les
preparatifs de l'ascension. Au meme moment, une estafette accourt. On nous
donne l'ordre de plier le ballon, et de le porter de l'autre cote de la
Loire, ou l'armee se rassemble. Le degonflement se fait en toute hate.
Mais il y a pour une bonne heure de travail.
Voila une charrette qui passe attelee d'un bon cheval.
--Hola! mon bonhomme, crie le capitaine au charretier, vous etes vide, je
mets votre voiture en requisition, nous en avons besoin.
--Ma foi, mon capitaine, prenez, si vous voulez, la voiture et le cheval
ne sont pas a moi.
Le filet plie, le ballon, la nacelle, sont hisses sur la charrette qui se
met en marche. Il etait temps: les projectiles ennemis sifflaient dans
l'air et tombaient a profusion sur le chateau du Colombier.
Je cours payer notre brave hotesse, et je vois le lieutenant de mobiles
devant le foyer de la cheminee. Une cuiller a la main, il fait mijoter son
lapin.
--Allons, mon lieutenant, en route. Vous avez fait la un joli dejeuner
pour les Prussiens. Mais consolez-vous, nous mangerons a Orleans!
Le pauvre village va etre abandonne. Les ennemis vont venir. Tous les
paysans sont en proie a la plus violente emotion, on en voit qui se
sauvent, on en voit d'autres qui se hatent de cacher les objets qui leur
sont chers!
Nos 150 mobiles suivent la charrette. On arrive bientot par un chemin de
traverse a la grande route qui conduit en ville. Mais nous attendons
une grande demi-heure pour prendre rang au milieu de la longue queue de
voitures d'approvisionnement et de troupes qui defilent depuis plus de
douze heures.
Il faut avoir assiste au spectacle de la retraite de cent mille hommes
pour se faire une juste idee du chaos, de l'encombrement desordonne qui en
resulte. Deux files de charrettes suivent la route au milieu des troupes;
des cavaliers dominent pele-mele cet ocean humain, chaque charretier veut
devancer son voisin, a chaque minute la file s'arrete pour ne reprendre
qu'un pas lent et irregulier. Tout le
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