e te laisse le titre de
_vache_, que tu t'attribues dans tes jours de lassitude. C'est egal,
dis-moi quand tu seras a Paris. Il est probable qu'il me faudra y aller
quelques jours pour une chose ou l'autre. Nous nous embrasserons, et
puis vous viendrez a Nohant cet ete. C'est convenu, il le faut!
Mes tendresses a la maman et a la belle niece.
DCXXXI
A M. PAUL DE SAINT-VICTOR, A PARIS
Nohant, 18 fevrier 1867.
Combien je vous remercie de ce beau livre, un chef-d'oeuvre, un modele
pour le fond, et pour la forme! Ce n'est pas une decouverte pour moi.
Je vous ai toujours suivi avec l'adoration de votre talent, chaque jour
plus pur et plus plein; mais il fait bon tenir tout cela ensemble et le
relire comme on relit sans cesse Mozart et Beethoven.
Si je n'eusse ete malade, et _tres malade_, j'aurais voulu joindre ma
petite note au concert des eloges, et la _Revue des Deux Mondes_ m'eut
_peut-etre_ laisse dire. Mais ce n'est que depuis trois jours que je
peux ecrire quelques pages. L'article que j'ai publie sur le livre de
Maurice etait fait il y a longtemps. Ce livre, qu'on a du vous porter de
sa part, devait paraitre beaucoup plus tot.
Me voila revenue a la vie et vous y avez contribue. Si quelque chose
remet la tete et le coeur a leur place, c'est ce que vous avez dans la
tete et dans le coeur.
Bien a vous.
G. SAND.
Mon fils veut aussi que je vous dise son admiration.
DGXXXII
A M. ARMAND BARBES, A LA HAYE
Nohant, 2 mars 1867.
Cher excellent ami,
Je suis guerie depuis une huitaine de jours; je reprends mes forces
rapidement et je travaille. Je veux vous le dire pour ne pas laisser a
votre tendre amitie une preoccupation vaine. Je refais un nouveau bail,
sans joie ni chagrin, comme je vous le disais. La vie ne m'apportera pas
de nouveaux bonheurs et peut-etre me menage-t-elle de nouveaux chagrins.
Inutile d'en supputer les chances, puisque le devoir est de l'accepter
quelle qu'elle soit.
Ainsi vous faites, avec un courage bien superieur au mien, qui n'est
qu'un detachement amene par l'experience. Vous, toujours prisonnier
ou malade, vous n'avez guere vecu reellement; aussi votre ame s'est
habituee a s'epanouir quand meme, dans une region au-dessus de la vie
reelle, et cette noble existence torturee, toujours souriante et douce,
restera comme une legende dans le coeur de nos enfants.
Merci, merci, et pardon mille
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