e talent et de science a
Stefanini, a Saverio, et a tous ceux qui ont paru avec moi sur la scene!
--A ce compte, chere Corilla, je courrais autant de risques en me
montrant aupres de toi, que j'en cours aupres de la Consuelo. Si j'avais
eu la fantaisie de te suivre en France, tu me donnerais la un bon
avertissement."
Ces mots echappes a Anzoleto furent un trait de lumiere pour la Corilla.
Elle vit qu'elle avait frappe plus juste qu'elle ne s'en flattait
encore; car la pensee de quitter Venise s'etait deja formulee dans
l'esprit de son amant. Des qu'elle concut l'espoir de l'entrainer avec
elle, elle n'epargna rien pour lui faire gouter ce projet. Elle
s'abaissa elle-meme tant qu'elle put, et elle se mit au-dessous de sa
rivale avec une modestie sans bornes. Elle se resigna meme a dire
qu'elle n'etait ni assez grande cantatrice, ni assez belle pour allumer
des passions dans le public. Et comme tout cela etait plus vrai qu'elle
ne le pensait en le disant, comme Anzoleto s'en apercevait de reste, et
ne s'etait jamais abuse sur l'immense superiorite de Consuelo, elle
n'eut pas de peine a le lui persuader. Leur association et leur fuite
furent donc a peu pres resolues dans cette seance; et Anzoleto y
songeait serieusement, bien qu'il se gardat toujours une porte de
derriere pour echapper a cet engagement dans l'occasion.
Corilla, voyant qu'il lui restait un fond d'incertitude, l'engagea
fortement a continuer ses debuts, le flattant de l'esperance d'un
meilleur sort pour les autres representations; mais bien certaine, au
fond, que ces epreuves malheureuses le degouteraient completement et de
Venise et de Consuelo.
En sortant de chez sa maitresse, il se rendit chez son amie. Un
invincible besoin de la revoir l'y poussait imperieusement. C'etait la
premiere fois qu'il avait fini et commence une journee sans recevoir son
chaste baiser au front. Mais comme, apres ce qui venait de se passer
avec la Corilla, il eut rougi de sa versatilite, il essaya de se
persuader qu'il allait chercher aupres d'elle la certitude de son
infidelite, et le desabusement complet de son amour. Sans nul doute, se
disait-il, le comte aura profite de l'occasion et du depit cause par mon
absence, et il est impossible qu'un libertin tel que lui se soit trouve
avec elle la nuit en tete-a-tete, sans que la pauvrette ait succombe.
Cette idee lui faisait pourtant venir une sueur froide au visage; s'il
s'y arretait, la certitude du remords et du desespoir
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