e a-t-il pu s'introduire ici?"
Il alla ramasser la balle, non sans s'assurer au prealable qu'il n'etait
pas epie par le judas perce au milieu de sa porte. Le judas etait
ferme... ou du moins il paraissait l'etre.
Il alla se placer a la fenetre, tournant ainsi le dos a la porte, et
contempla l'objet qui venait de lui etre jete.
C'etait un assez gros paquet de laine enroule autour d'un corp dur. Il
le defit rapidement et trouva un feuillet enroule autour d'une pierre.
Il deplia le feuillet et lut:
"Ne mangez rien, ne buvez rien de ce qu'on vous servira. On veut vous
empoisonner. Avant trois jours, j'aurai reussi a vous faire evader. Si
j'echoue, il sera temps pour vous de prendre le poison qui doit vous
foudroyer. Patientez donc ces trois jours. Courage. Espoir."
"Trois jours sans boire ni manger, songea Pardaillan en faisant la
grimace, diable! A ce compte-la, je ne sais s'il ne vaudrait pas mieux
me resigner au poison tout de suite... Oui, mais si le Chico reussit?...
Hum!... Que veut-il faire?... Bah! apres tout, je ne mourrai pas pour
trois jours de jeune, tandis que je mourrai fort proprement du poison...
d'autant que ces trois jours se reduisent a deux, attendu qu'il me reste
de mon souper d'hier de quoi me nourrir aujourd'hui. Puisque j'ai mange
de ces provisions hier soir et que je ne suis pas encore mort, j'ai tout
lieu de penser qu'elles ne sont pas empoisonnees. En consequence, je
puis encore en manger."
Ayant ainsi decide, il prit les provisions qui lui restaient, en fit
deux parts, et attaqua bravement la premiere. Quand il ne resta plus
miette de la ration qu'il s'etait accordee, il prit la deuxieme part et
alla l'enfermer dans le coffre a habits. Et il attendit.
Il paraissait tres calme en apparence, mais, de l'effort qu'il faisait
pour se maitriser, il sentait la sueur perler a son front. En effet,
savait-il si on n'avait pas profite de son sommeil pour meler a ces
restes le poison qui devait le foudroyer, disait le billet de Chico.
Entre-temps, on lui avait apporte son dejeuner. Les moines qui le
servaient avaient paru s'etonner de la disparition des restes du souper
de la veille. Mais, comme le prisonnier avait refuse de toucher au
dejeuner qu'ils apportaient, ils avaient du penser que, pris d'une
fringale subite, il avait prefere se contenter de ces restes et que,
maintenant, il n'avait plus faim. Ils avaient donc laisse la table
servie et s'etaient retires, toujours sans ouvrir la bouch
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