adt, et surtout
il prevoyait des longueurs interminables, pour mettre d'accord tous
ces petits princes allemands. Un pareil role n'etait pas de son gout;
d'ailleurs il etait fatigue; et un peu d'impatience d'arriver a Paris,
et de monter au capitale de la Rome moderne, etait bien naturel.
Il partit de Rastadt, traversa la France incognito, et arriva a Paris le
15 frimaire an VI au soir (5 decembre 1797). Il alla se cacher dans
une maison fort modeste, qu'il avait fait acheter rue Chantereine. Cet
homme, chez lequel l'orgueil etait immense, avait toute l'adresse d'une
femme a le cacher. Lors de la reddition de Mantoue, il s'etait soustrait
a l'honneur de voir defiler Wurmser; a Paris il voulut se cacher dans
la demeure la plus obscure. Il affectait dans son langage, dans son
costume, dans toutes ses habitudes, une simplicite qui surprenait
l'imagination des hommes, et la touchait plus profondement par l'effet
du contraste. Tout Paris, averti de son arrivee, etait dans une
impatience de le voir qui etait bien naturelle, surtout a des Francais.
Le ministre des affaires etrangeres, M. de Talleyrand, pour lequel il
s'etait pris de loin d'un gout fort vif, voulut l'aller visiter le soir
meme. Bonaparte demanda la permission de ne pas le recevoir, et le
prevint le lendemain matin. Le salon des affaires etrangeres etait plein
de grands personnages, empresses de voir le heros. Silencieux pour tout
le monde, il apercut Bougainville, et alla droit a lui pour lui dire de
ces paroles qui, tombant de sa bouche, devaient produire des impressions
profondes. Deja il affectait le gout d'un souverain pour l'homme utile
et celebre. M. de Talleyrand le presenta au directoire. Quoiqu'il y eut
bien des motifs de mecontentement entre le general et les directeurs,
cependant l'entrevue fut pleine d'effusion. Il convenait au directoire
d'affecter la satisfaction, et au general la deference. Du reste
les services etaient si grands, la gloire si eblouissante, que
l'entrainement devait faire place au mecontentement. Le directoire
prepara une fete triomphale pour la remise du traite de Campo-Formio.
Elle n'eut point lieu dans la salle des audiences du directoire, mais
dans la grande cour du Luxembourg. Tout fut dispose pour rendre cette
solemnite l'une des plus imposantes de la revolution. Les directeurs
etaient ranges au fond de la cour, sur une estrade, au pied de l'autel
de la patrie, et revetus du costume romain. Autour d'eux, les ministres,
les
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