, repond Robespierre; malheur a qui
se nomme lui-meme! Oui, la Montagne est pure, elle est sublime; les
intrigans ne sont pas de la Montagne." Robespierre s'etend ensuite
longuement sur les efforts qu'on fait pour effrayer les membres de la
convention, et pour leur persuader qu'ils sont en danger; il dit qu'il n'y
a que des coupables qui soient ainsi effrayes, et qui veuillent effrayer
les autres. Il raconte alors ce qui s'est passe la veille entre Tallien et
les espions, qu'il appelle des _courriers du comite_. Ce recit amene des
explications tres vives de la part de Tallien, et vaut a ce dernier
beaucoup d'injures. Enfin on termine toutes ces discussions par l'adoption
des demandes faites par Couthon et Robespierre. Les amendemens de la
veille sont rapportes, ceux du jour sont repousses, et l'affreuse
loi du 22 reste telle qu'elle avait ete proposee.
Les meneurs du comite triomphaient donc encore une fois; leurs adversaires
tremblaient. Tallien, Bourdon, Ruamps, Delacroix, Mallarme, tous ceux qui
avaient fait des objections a la loi, se croyaient perdus, et craignaient a
chaque instant d'etre arretes. Bien que le decret prealable de la
convention fut necessaire pour la mise en accusation, elle etait encore
tellement intimidee qu'elle pouvait accorder tout ce qu'on lui demanderait.
Elle avait rendu le decret contre Danton; elle pouvait bien le rendre
encore contre ceux de ses amis qui lui survivaient. Le bruit se repandit
que la liste etait faite; on portait le nombre des victimes a douze, puis a
dix-huit. On les nommait. Bientot l'effroi se repandit, et plus de soixante
membres de la convention ne couchaient plus chez eux.
Cependant un obstacle s'opposait a ce qu'on disposat de leur vie aussi
aisement qu'ils le craignaient. Les chefs du gouvernement etaient divises.
On a deja vu que Billaud-Varennes, Collot, Barrere, avaient froidement
repondu aux premieres plaintes de Robespierre contre ses collegues. Les
membres du comite de surete generale lui etaient plus opposes que jamais,
car ils venaient d'etre eloignes de toute cooperation a la loi du 22, et il
parait meme que quelques-uns d'entre eux etaient menaces. Robespierre et
Couthon poussaient l'exigence fort loin; ils auraient voulu sacrifier un
grand nombre de deputes; ils parlaient de Tallien, Bourdon de l'Oise,
Thuriot, Rovere, Lecointre, Panis, Monestier, Legendre, Freron, Barras; ils
demandaient meme Cambon, dont la renommee financiere les genait, et qui
avait
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