onarque universel, que peut-etre j'outrage,
Pardonne a mes soupirs; je connais mon erreur.
Pour un jeune arbrisseau que tourmente l'orage,
Dois-tu suspendre la fureur?
D'un pas toujours egal, la Nature insensible
Marche, et suit les decrets avec tranquillite.
Audacieux enfant contre elle revolte,
Je me debats en vain sous le bras inflexible
De la Necessite.
Il s'arrete un moment aux projets les plus sinistres et les envisage
sans effroi:
Terre, ou va s'engloutir ma depouille fragile,
Terre, qui l'entretiens de la cendre des morts,
O ma mere, a ton fils daigne ouvrir un asile,!
Heureux, si dans ton sein doucement je m'endors!
Sous la tombe, du moins, l'infortune est tranquille.
Mais a l'instant la terre s'entr'ouvre, l'Ombre de son pere en sort et
le rappelle a la raison, a la constance, a la vertu, lui montre une
soeur cherie qui lui reste, et l'invite aux beaux-arts, a la poesie
noblement consolatrice. Ce _Cri de mon Coeur_ semble avoir exhale en une
fois toute cette ferveur troublee de la jeune ame de Fontanes, et on
n'en retrouvera plus trace desormais dans son talent pur, tendre,
melancolique, et moins ardent que sensible[100].
[Note 100: Je veux etre tout a fait exact: outre cette meme piece du
_Cri de mon Coeur_, le _Journal des Dames_ de 1777 (par consequent un
peu anterieur a l'_Almanach des Muses_ de 1778) contenait une lettre
de Fontanes a Dorat, toujours dans ce ton exalte qui contraste
singulierement avec les idees desormais attachees en sens divers a ces
deux noms de Dorat et de Fontanes. En voici quelques passages:
"Monsieur, je m'etais promis de cacher avec soin les faibles essais de
mon enfance, et de ne cultiver les lettres que pour me consoler de
mes malheurs. C'etait au fond d'un desert, et non dans le sein dela
capitale, que j'avais resolu de vivre. La solitude convient mieux a
l'infortune qui veut au moins se plaindre en liberte, que ces prisons
fastueuses ou des esclaves imitent les travers et les vices d'autres
esclaves, ou le vrai sage ne peut faire un pas sans colere ou sans
pitie.. Je me suis dit de bonne heure: Tu es malheureux, tu es sans
appui, tu es trop fier pour ramper; vegete donc dans une retraite
ignoree. Paris n'est, pas fait pour toi.
Si l'amour de la poesie me forcait, malgre moi, de lui sacrifier
quelques heures, je ne peignais que mes douleurs ou les tableaux de la
campagne que j'avais sous les yeux. Je me contentais de repandre mes
pla
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