lus
qu'Israelite en aucune facon. Elle etait de bon sang espagnol, sans
doute mauresque a l'origine, car elle etait passablement brune, et toute
sa personne avait une tranquillite qui n'annoncait rien des races
vagabondes. Ce n'est point que de ces races-la je veuille medire. Si
j'avais invente le personnage de Consuelo, je ne pretends point que je
ne l'eusse fait sortir d'Israel, ou de plus loin encore; mais elle etait
formee de la cote d'Ismael, tout le revelait, dans son organisation. Je
ne l'ai point vue, car je n'ai pas encore cent ans, mais on me l'a
affirme, et je n'y puis contredire. Elle n'avait pas cette petulance
febrile interrompue par des acces de langueur apathique qui distingue
les _zingarelle_. Elle n'avait pas la curiosite insinuante et la
mendicite tenace d'une _ebbrea_ indigente. Elle etait aussi calme que
l'eau des lagunes, et en meme temps aussi active que les gondoles
legeres qui en sillonnent incessamment la face.
Comme elle grandissait beaucoup, et que sa mere etait fort miserable,
elle portait toujours ses robes trop courtes d'une annee; ce qui donnait
a ses longues jambes de quatorze ans, habituees a se montrer en public,
une sorte de grace sauvage et d'allure franche qui faisait plaisir et
pitie a voir. Si son pied etait petit, on ne le pouvait dire, tant il
etait mal chausse. Eh revanche; sa taille, prise dans des _corps_
devenus trop etroits et craques a toutes les coutures, etait svelte et
flexible comme un palmier, mais sans forme, sans rondeur, sans aucune
seduction. La pauvre fille n'y songeait guere, habituee qu'elle etait a
s'entendre traiter de _guenon_, de _cedrat_, et de _moricaude_, par les
blondes, blanches et repletes filles de l'Adriatique. Son visage tout
rond, bleme et insignifiant, n'eut frappe personne, si ses cheveux
courts, epais et rejetes derriere ses oreilles, en meme temps que son
air serieux et indifferent a toutes les choses exterieures, ne lui
eussent donne une certaine singularite peu agreable. Les figures qui ne
plaisent pas perdent de plus en plus la faculte de plaire. L'etre qui
les porte, indifferent aux autres, le devient a lui-meme, et prend une
negligence de physionomie qui eloigne de plus en plus les regards. La
beaute s'observe, s'arrange, se soutient, se contemple, et se pose pour
ainsi dire sans cesse dans un miroir imaginaire place devant elle. La
laideur s'oublie et se laisse aller. Cependant il en est de deux sortes:
l'une qui souffre et proteste san
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