rochees de
moi et me touchent presque. Mon chien hurle et aboie. Le cheval souffle
avec effroi et frissonne entre mes jambes, en proie a une profonde
terreur. Interdit, incertain, je reste sur ma selle, attendant l'evenement
avec une anxiete inexprimable. Mes oreilles sont remplies d'un
bourdonnement pareil au bruit d'une grande machine; mes yeux sont frappes
d'eblouissements au milieu desquels se melent toutes les couleurs; mon
cerveau est en ebullition. D'etranges apparitions voltigent devant moi.
J'ai le delire de la fievre. Les courants charges se rencontrent et se
heurtent dans leur terrible tourbillonnement. Je me sens saisi par une
force invincible et arrache de ma selle. Mes yeux, ma bouche, mes oreilles
sont remplis de poussiere. Le sable, les pierres et les branches d'arbres
me fouettent la figure, je suis lance avec violence contre le sol.
Un moment, je reste immobile, a moitie enseveli et aveugle. Je sens que
d'epais nuages de sable roulent au-dessus de moi. Je ne suis ni blesse, ni
contusionne; j'essaie de regarder autour de moi, mais il m'est impossible
de rien distinguer; je ne puis ouvrir mes yeux, qui me font horriblement
souffrir. J'etends les bras, cherchant apres mon cheval. Je l'appelle par
son nom. Un petit cri plaintif me repond. Je me dirige du cote d'ou vient
ce cri, et je pose ma main sur l'animal. Il git couche sur le flanc. Je
saisis la bride et il se releve; mais je sens qu'il tremble comme la
feuille. Pendant pres d'une demi-heure, je reste aupres de sa tete,
debarrassant mes yeux du sable qui les remplit, et attendant que le simoun
soit passe. Enfin l'atmosphere s'eclaircit, et le ciel se degage; mais le
sable, encore agite le long des collines, me cache la surface de la
plaine. Gode a disparu. Sans doute il est dans les environs; je l'appelle
a haute voix; j'ecoute, pas de reponse. De nouveau j'appelle avec plus de
force... rien; rien que le sifflement du vent. Aucun indice de la
direction qu'il a pu prendre! Je remonte a cheval et parcours la plaine
dans tous les sens. Je decrivis un cercle d'un mille environ, en
l'appelant a chaque instant. Partout le silence et aucune trace sur le
sol. Je courus pendant une heure, galopant d'une colline a l'autre, mais
sans apercevoir aucun vestige de mon camarade ou des mules. J'etais
desespere. J'avais crie jusqu'a extinction. Je ne pouvais pas pousser plus
loin mes recherches. Ma gorge etait en feu; je voulus boire! Mon Dieu! ma
gourde etait brisee,
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