oreille attentive, aiguisee et inquiete; je fremissais en songeant que
deja on se rendait pour choisir la meilleure place afin de savourer plus
longtemps les dernieres palpitations d'un corps humain suspendu au bout
d'une corde.
Je supputai qu'il pouvait etre alors quatre heures et demie.
Jamais je ne saurais vous depeindre les angoisses, les tortures, les
inexprimables douleurs, les anxieuses esperances que chaque minute
m'apporta, en attendant le retour de monsieur Odillon.
Enfin des pas se firent entendre dans le corridor, la porte de mon
cachot s'ouvrit et la figure grave de l'homme de bien m'apparut. Il
etait accompagne de deux tourne-clefs.
J'ai enfin pu penetrer aupres du Gouverneur apres des peines sans nombre
me dit-il tristement.
Il parait qu'il a failli etre assassine hier soir et il a noye sa
frayeur dans de copieuses libations. Il m'a donne sa parole qu'il allait
envoyer immediatement l'ordre d'un sursis. Il a refuse de m'en charger
tant il est encore abasourdi, mais il consent neanmoins a ce qu'on vous
ote vos fers et permet que vous communiquiez avec Attenousse?
Vous savez, reprit-il avec amertume, pendant qu'on me delivrait de mes
fers, qu'on met plus d'empressement souvent a condamner ses semblables
qu'a sauver un innocent.
Ce fut d'un pas defaillant qu'accompagne de monsieur Odillon et d'un
guichetier je pus me rendre au cachot d'Attenousse. Lorsque nous
entrames, il dormait encore, mais le bruit de nos pas l'eveilla. En
m'apercevant, il s'elanca au bout de ses chaines et nous nous tinmes
longtemps embrasses. "Angeline, mon entant, et ma vieille mere, me
demanda-t-il lorsqu'il put parier, que sont elles devenues?" Je ne pus
lui repondre, je me sentais, etouffe sous le poids, de tant d'emotions.
Alors monsieur Odillon vint a mon secours, il lui raconta en quelques
mots les principaux incidents qui m'etaient advenus depuis mon depart a
bord de la corvette, _La Brise_.
Puis nous lui fimes part de l'assurance que le Gouverneur avait donne de
l'envoi d'un sursis, bien que nous n'y ajoutames que peu de foi et que
nous ne conservames nous-memes aucun espoir, Tout est bien fini pour le
pauvre guerrier sauvage, nous repondit-il, en secouant tristement la
tete.
Cette nuit dans un songe, il a vu sa femme, sa vieille mere et son
enfant, mais elles etaient la-haut, dans la demeure du Grand Esprit,
c'est donc qu'il les reverra desormais.
L'horloge marquait cinq heures et un quart et l'ordre d
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