e moment,
les dangers de la mer et d'une rencontre avec les Anglais etaient
passes; les plus grands obstacles etaient vaincus avec ce bonheur qui
semble toujours accompagner la jeunesse d'un grand homme.
L'Egypte, sur laquelle nous venions d'aborder, est le pays le plus
singulier, le mieux situe, et l'un des plus fertiles de la terre. Sa
position est connue. L'Afrique ne tient a l'Asie que par un isthme de
quelques lieues, qu'on appelle l'isthme de Suez, et qui, s'il etait
coupe, donnerait acces de la Mediterranee dans la mer de Indes,
dispenserait les navigateurs d'aller a des distances immenses, et au
milieu des tempetes, doubler le cap de Bonne-Esperance. L'Egypte est
placee parallelement a la mer Rouge et a l'isthme de Suez. Elle est la
maitresse de cet isthme. C'est cette contree qui, chez les anciens
et dans le moyen-age, pendant la prosperite des Venitiens, etait
l'intermediaire du commerce de l'Inde. Telle est sa position entre
l'Occident et l'Orient. Sa constitution physique et sa forme ne sont pas
moins extraordinaires. Le Nil, l'un des grands fleuves du monde, prend
sa source dans les montagnes de l'Abyssinie, fait six cents lieues dans
les deserts de l'Afrique, puis entre en Egypte, ou plutot y tombe, en
se precipitant des cataractes de Syene, et parcourt encore deux cents
lieues jusqu'a la mer. Ses bords constituent toute l'Egypte. C'est
une vallee de deux cents lieues de longueur, sur cinq a six lieues de
largeur. Des deux cotes elle est bordee par un ocean de sables. Quelques
chaines de montagnes, basses, arides et dechirees, sillonnent tristement
ces sables, et projettent a peine quelques ombres sur leur immensite.
Les unes separent le Nil de la mer Rouge, les autres le separent du
grand desert, dans lequel elles vont se perdre. Sur la rive gauche du
Nil, a une certaine distance dans le desert, serpentent deux langues de
terre cultivable, qui font exception aux sables, et se couvrent d'un peu
de verdure. Ce sont les _oasis_, especes d'iles vegetales, au milieu de
l'ocean des sables. Il y en a deux, la grande et la petite. Un effort
des hommes, en y jetant une branche du Nil, en ferait de fertiles
provinces. Cinquante lieues avant d'arriver a la mer, le Nil se partage
en deux branches, qui vont tomber a soixante lieues l'une de l'autre,
dans la Mediterranee, la premiere a Rosette, la seconde a Damiette. On
connaissait autrefois sept bouches au Nil; on les apercoit encore, mais
il n'y en a plus que deux d
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