aient peu de luxe.
Cependant Larevelliere, qui aimait assez le monde, les arts et les
sciences, et qui se croyait oblige de depenser ses appointemens d'une
maniere utile a l'etat, recevait chez lui des savans et des gens de
lettres, mais il les traitait avec simplicite et cordialite. Il s'etait
expose malheureusement a quelque ridicule, sans y avoir du reste
contribue en aucune maniere. Il professait en tout point la philosophie
du dix-huitieme siecle, telle qu'elle etait exprimee dans la profession
de foi du Vicaire savoyard. Il souhaitait la chute de la religion
catholique, et se flattait qu'elle finirait bientot, si les gouvernemens
avaient la prudence de n'employer contre elle que l'indifference et
l'oubli. Il ne voulait pas des pratiques superstitieuses et des images
materielles de la Divinite; mais il croyait qu'il fallait aux hommes des
reunions, pour s'entretenir en commun de la morale et de la grandeur
de la creation. Ces sujets en effet ont besoin d'etre traites dans des
assemblees, parce que les hommes y sont plus prompts a s'emouvoir, et
plus accessibles aux sentimens eleves et genereux. Il avait developpe
ces idees dans un ecrit, et avait dit qu'il faudrait un jour faire
succeder aux ceremonies du culte catholique des reunions assez
semblables a celles des protestans, mais plus simples encore, et plus
degagees de representation. Cette idee, accueillie par quelques esprits
bienveillans, fut aussitot mise a execution. Un frere du celebre
physicien Hauey forma une societe qu'il intitula des _Theophilanthropes_,
et dont les reunions avaient pour but les exhortations morales, les
lectures philosophiques et les chants pieux. Il s'en forma plus d'une
de ce genre. Elles s'etablirent dans des salles louees aux frais des
associes, et sous la surveillance de la police. Quoique Larevelliere
crut cette institution bonne, et capable d'arracher aux eglises
catholiques beaucoup de ces ames tendres qui ont besoin d'epancher en
commun leurs sentimens religieux, il se garda de jamais y figurer ni
lui ni sa famille, pour ne pas avoir l'air de jouer un role de chef
de secte, et ne pas rappeler le pontificat de Robespierre. Malgre la
reserve de Larevelliere, la malveillance s'arma de ce pretexte pour
verser quelque ridicule sur un magistrat universellement honore, et
qui ne laissait aucune prise a la calomnie. Du reste, si la
theophilanthropie etait le sujet de quelques plaisanteries fort peu
spirituelles chez Barras, ou dans les
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