r, etait parvenu au comble des honneurs; mais il
n'etait arrive au faite que pour en etre precipite. Son orgueil avait
blesse tout le monde. Les sarcasmes etaient parvenus jusqu'a son oreille,
et il avait vu chez quelques-uns de ses collegues une hardiesse qui ne leur
etait pas ordinaire. Le lendemain il se rend au comite de salut public, et
exprime sa colere contre les deputes qui l'ont outrage la veille. Il se
plaint de ces amis de Danton, de ces restes impurs du parti _indulgent et
corrompu_, et en demande le sacrifice. Billaud-Varennes et
Collot-d'Herbois, qui n'etaient pas moins blesses que leurs collegues du
role que Robespierre avait joue la veille, se montrent tres froids et peu
empresses a le venger. Ils ne defendent pas les deputes dont se plaint
Robespierre, mais ils reviennent sur la derniere fete, ils expriment des
craintes sur ses effets. Elle a indispose, disent-ils, beaucoup d'esprits.
D'ailleurs ces idees d'Etre supreme, d'immortalite de l'ame, ces pompes
semblent un retour vers les superstitions d'autrefois, et peuvent faire
retrograder la revolution. Robespierre s'irrite alors de ces remarques; il
soutient qu'il n'a jamais voulu faire retrograder la revolution, qu'il a
tout fait au contraire pour accelerer sa marche. En preuve, il cite un
projet de loi qu'il vient de rediger avec Couthon, et qui tend a rendre le
tribunal revolutionnaire encore plus meurtrier. Voici quel etait ce projet:
Depuis deux mois il avait ete question d'apporter quelques modifications a
l'organisation du tribunal revolutionnaire. La defense de Danton, Camille,
Fabre, Lacroix, avait fait sentir l'inconvenient des restes de formalites
qu'on avait laisse exister. Tous les jours encore il fallait entendre des
temoins et des avocats, et quelque brieve que fut l'audition des temoins,
quelque restreinte que fut la defense des avocats, neanmoins elles
emportaient une grande perte de temps, et amenaient toujours un certain
eclat. Les chefs de ce gouvernement, qui voulaient que tout se fit
promptement et sans bruit, desiraient supprimer ces formalites incommodes.
S'etant habitues a penser que la revolution avait le droit de detruire tous
ses ennemis, et qu'a la simple inspection on devait les distinguer, ils
croyaient qu'on ne pouvait rendre la procedure revolutionnaire trop
expeditive. Robespierre, particulierement charge du tribunal, avait prepare
la loi avec Couthon seul, car Saint-Just etait absent. Il n'avait pas
daigne consulter ses
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