. Je dirai seulement qu'apres
plusieurs sessions on alla aux suffrages, et la condamnation ainsi que
la deposition de l'empereur furent resolues. Ensuite le pape prononca
le jugement par lequel il declara Frederic dechu de l'empire et de ses
etats, defendant a tous les fideles de le reconnaitre desormais pour
empereur ni pour roi; il dispensait tous ses sujets du serment de
fidelite qu'ils lui avaient fait, et ordonnait aux electeurs de l'empire
de proceder a l'election d'un nouvel empereur.
Frederic etait a Turin lorsqu'il apprit cette nouvelle. On peut
s'imaginer les mouvemens qu'elle produisit dans le coeur d'un prince
aussi violent que lui. S'etant un peu calme, il se fit apporter la
couronne imperiale; et, la mettant sur sa tete, il dit: _La voila cette
couronne qu'on veut m'enlever, et il y aura bien du sang repandu avant
quelle m'echappe_.
Cette menace n'eut que trop d'effet; mais, pour prevenir l'impression
que pourrait faire dans l'Europe la publication de ce jugement du pape,
Frederic ecrivit une lettre circulaire a tous les princes, pour leur
faire comprendre les consequences de cette entreprise; qu'il s'agissait
dans cette affaire, non pas de son interet particulier, mais de celui
des rois, qui devaient tout apprehender d'un homme qui traitait si
outrageusement le premier des souverains.
Outre cette lettre circulaire, Frederic en ecrivit une particuliere
au roi de France, ou, repetant les principales choses qui regardaient
l'interet commun que tous les souverains avaient de ne pas souffrir que
les papes osassent attaquer ainsi les tetes couronnees; il lui faisait
remarquer que, quoique par l'usage le couronnement des empereurs
appartint au pape, il ne leur donnait nul droit sur leurs couronnes et
sur leur puissance temporelle, et qu'en vertu de cette ceremonie il ne
pouvait pas plus les en depouiller qu'un eveque particulier du royaume
ne pouvait detroner le roi qu'il aurait couronne. Ensuite il lui
representait la nullite des procedures qu'on avait faites contre lui,
le priant de se souvenir de l'etroite alliance qu'il y avait depuis si
long-temps entre les empereurs de sa maison et les rois de France. On
voit encore une lettre de Frederic sur le meme sujet, qui fut apportee
par Pierre Desvignes, son chancelier, a saint Louis, ou l'empereur le
faisait juge, avec les pairs laiques et la noblesse de France, de la
justice de sa cause.
On ne sait point en detail ce que le roi repondit a ces lettres; mai
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