en proie au naturalisme, tenait compte dans une
certaine mesure de l'influence des forces de la nature sur la decision
humaine et partant sur l'evolution du drame. Et dans ce cas la mise en
scene s'elevait au role d'une puissance mysterieuse, superieure a la
volonte humaine: elle nouait ou denouait le drame comme la fatalite
antique. Le theatre en presente de nombreux exemples. Ainsi le voyageur,
au moment de quitter l'auberge ou il s'est mis a l'abri, est assailli
par la tempete: le tonnerre se mele au bruit de la grele ou de la
pluie; le vent repousse la porte avec violence; le voyageur, fortement
impressionne, recule, reste et est assassine.
Certes, c'est un art inferieur que celui qui met une evolution, qui
ne devrait etre que passionnelle, sous la dependance de phenomenes
contingents. Cependant l'intervention des forces mysterieuses de la
nature est dans ce cas tout a fait remarquable, en ce que l'illusion
theatrale agit directement sur le personnage du drame, a l'emotion
duquel s'associe le spectateur. L'impression causee par la mise en scene
est donc en meme temps ressentie par le personnage et par le spectateur,
et celui-ci ne comprendrait pas que celui-la y restat insensible. Cela
tient sans doute a ce que la nature nous impose sa puissance en la
transformant en mouvement et en bruit, double phenomene dont la
representation ne change pas le mode d'action. Quelle qu'en soit la
raison d'ailleurs, nous sommes amenes a constater que, dans ce cas,
l'evolution du drame est due a une cause naturelle objective.
Mais l'ecole moderne a fait un pas de plus, en cherchant a donner a
l'evolution dramatique une cause naturelle objective, qui s'adressat a
celui de nos sens qui est le plus artistique, a celui de la vue. C'est
la, en realite, que commencent les difficultes. Nous allons citer un
exemple ou l'intention realiste de l'auteur est pleinement justifiee, ce
qui nous permettra de deduire les conditions esthetiques dans lesquelles
le probleme peut en general etre resolu. Je prendrai cet exemple dans le
second acte de _l'Ami Fritz_, et je rappellerai aux lecteurs, qui tous
connaissent la piece, la fontaine ou Suzel vient puiser de l'eau, eau
veritable que le public voit couler. Quelques-uns ont critique, a tort,
a mon sens, cette recherche d'un effet reel. C'est la vue de l'eau qui
eveille chez Sichel le desir de boire, et c'est l'action de boire a
la cruche que penche la jeune fille qui ramene a la memoire du rabbin
l
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