blancs ceux que portait
Jeanne d'Albret, la nuit de sa mort.
Il les saisit et, fermant les yeux, les baisa longuement.
Pardaillan, hors de lui, en proie a une sorte de vertige, lui arracha
les gants, les remit a leur place, funebre relique, et, lui-meme, alla
renfermer, avec un effroi visible, le mysterieux coffret d'or dans
l'armoire.
Il y eut alors entre les deux hommes un long silence lourd d'angoisse.
L'action rapide de Pardaillan venait de preciser dans l'esprit de
Marillac un soupcon qu'il n'osait s'avouer a lui-meme.
Sa joie febrile, son bonheur trop surexcite par lui-meme, la vague
epouvante que recouvraient ce bonheur et cette joie, son incertitude,
ses doutes, son desespoir latent, en un eclair aveuglant, il comprit
tout, il se comprit soi-meme.
Et il assista, muet d'horreur, a l'abominable drame qui se deroulait
dans sa pensee.
La mort inexplicable de Jeanne d'Albret, ses mysterieux avertissements,
ce regard de terreur qu'elle avait eu en lui montrant le coffret d'or,
cette mort fit rentrer le soupcon dans l'esprit du comte.
Quel soupcon? Que Catherine avait assassine Jeanne d'Albret.
Non! Oh! non! Il ne voulait pas y croire!
S'il accusait Catherine, s'il acceptait cet infame soupcon, s'il
admettait sa mere meurtriere, c'est donc que sa mere se jouait de lui!
C'est donc qu'elle mentait en lui garantissant la dignite d'Alice! C'est
donc qu'Alice etait une creature de Catherine!
Si Alice l'avait joue, si Alice etait indigne, si son amour
s'effondrait!... Oh! mille morts plutot! Il fallait, de toute son
energie, repousser le soupcon.
Voila dans quels abimes tournoyait l'ame du comte de Marillac.
Voila pourquoi il s'arracha violemment a sa meditation. Voila pourquoi,
eclatant de rire, il alla ramasser la clef que le chevalier avait
jetee, la remit tranquillement a la serrure de l'armoire et s'ecria
joyeusement:
--Par Dieu, mon cher ami, je crois que nous sommes fous... C'est votre
faute aussi! Pourquoi m'avoir parle de la mort de Jeanne d'Albret? Ah!
oui, j'y suis. C'est ce costume noir qui est cause de tout... Eh bien,
oui, mon cher, |e me marierai en noir, je veux porter le deuil de
la grande amie que je pleurerai toujours... Parlons d'autre chose,
voulez-vous?
--Volontiers, comte, dit le chevalier en essuyant la sueur froide qui
mouillait ses tempes. Un dernier mot, toutefois.
--Parlez, cher ami.
--C'est bien decidement demain que doit avoir lieu votre mariage?
--De
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