cher ami.
--Tres bien. Mardi, quelle heure?
--Mais, vers les sept heures du soir. Il y aura une voiture dans
laquelle seront Loise et sa mere, ainsi que le marechal, de qui j'ai pu
obtenir qu'il ne se montrat pas. Nous serons une vingtaine...
--Bon. Je vous promets de vous en amener autant.
--Ah! si mon pere etait la!...
--Il sera rentre d'ici mardi, sans doute... Mais que veut tout ce
monde?...
--Ma foi, dit le chevalier, les voila qui se mettent a genoux!...
Avancons.
--En voila deux! hurla a ce moment une voix qui fit tressaillir le
chevalier.
Marillac et Pardaillan, tout en devisant, s'etaient heurtes a une foule
qui entourait quelque chose, devant la porte d'un couvent. Et cette
foule criait:
"Miracle! Noel!..."
Les deux jeunes gens avaient continue a avancer jusqu'au moment ou ils
se trouverent devant la porte du couvent, au milieu de gens dont les
uns entonnaient des cantiques, dont les autres, comme en delire,
s'embrassaient sans se connaitre, faisaient des signes de croix et se
frappaient la poitrine. Puis, tout ce peuple etait tombe a genoux,
tandis que Marillac et Pardaillan demeuraient debout.
La foule, tout en s'agenouillant, clama d'une voix le cri qu'elle
croyait etre le plus agreable a tous les saints du paradis:
"Mort aux huguenots!..."
C'est a ce moment que la voix en question cria:
"En voila deux!..."
Pardaillan reconnut aussitot Maurevert qui le designait specialement.
Maurevert etait entoure d'une quinzaine de gentilshommes, qui semblaient
le considerer comme leur chef. Au signe qu'il fit, ils se precipiterent
sur le chevalier, l'epee a la main.
Deja, la foule, furieuse, delirante, enveloppait les deux amis qui,
serres de pres, etouffes, ne pouvaient meme pas tirer leurs epees.
"Place! Place!" vociferaient les gentilshommes en essayant d'arriver
jusqu'a leurs deux victimes.
Mais chacun, dans ce peuple, tenait a se distinguer.
C'est pourquoi la foule ne s'ouvrit pas: elle voulait massacrer
elle-meme les deux huguenots qui, la dague a la main, immobiles,
contenaient encore par leur attitude les enrages qui les entouraient.
Les deux jeunes gens echangerent un regard; ils semblaient se dire:
"Nous allons mourir la, mais, avant de tomber, nous en decoudrons bien
quelques-uns?"
--Tue! Tue! vociferait Maurevert. Les huguenots a la hart!..."
Il y eut comme un vaste tourbillonnement de la foule; des milliers de
poings se leverent...
Mais, a ce moment,
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