Seulement, tout a coup, son
regard se fixa avec une effrayante expression sur la cheminee... puis,
une legere secousse l'agita... puis, ce fut fini, la reine etait
morte... morte... et son regard semblait encore s'attacher a cet objet
que, dans la seconde supreme, elle avait cherche des yeux...
Marillac se tut.
A travers ses doigts crispes sur ses yeux, des larmes s'echapperent.
--Mon cher comte, dit Pardaillan, pardonnez-moi d'avoir ramene vos
pensees vers ces penibles scenes... Mais, dites-moi... pouvez-vous me
dire quel etait cet objet que la reine regardait en mourant?
Marillac alla a une armoire, dont il portait la clef sur lui et,
l'ouvrant, il en tira un coffret d'or qu'il posa sur une table.
--Ce coffret, chevalier, m'a ete donne par une personne auguste. Je
l'avais a mon tour offert a la reine de Navarre, qui s'en servait pour
y mettre ses gants... Sans aucun doute, la pauvre reine, en mourant, a
voulu me dire de reprendre ce coffret qui se trouvait sur la cheminee de
sa chambre et de le garder comme un double souvenir... le souvenir de
mes deux meres.
--Ainsi, dit lentement le chevalier, c'est la reine Catherine qui vous a
donne ce coffret?
--Oui, mon ami, dit Marillac en frissonnant.
Les deux hommes se regarderent.
Et, sans doute, chacun d'eux put lire chez l'autre la pensee terrible
qui l'agitait, car tous les deux palirent et detournerent les yeux.
Marillac demeurait tremblant, les mains crispees sur le coffret d'or. Il
baissa la tete. Et, soudain, le mystere de sa pensee monta jusqu'a ses
levres, comme s'il n'eut pu le contenir davantage. Hagard, livide, il
murmura:
--Mon sang... je le donnerais jusqu'a la derniere goutte... pour savoir
la verite... oh! chevalier... cette verite... Ce n'est pas possible!...
Ce serait trop horrible que ce coffret ait ete l'instrument de mort...
que Catherine, ma mere, ait tue Jeanne, mon autre mere... et que moi...
moi... leur fils a toutes deux... aie porte a l'une le poison que lui
envoyait l'autre!
--Comte! Comte! s'ecria le chevalier, vous avez raison... ce serait trop
horrible...
--Ah! puisse-je donc etre foudroye plutot que de continuer a porter
de tels soupcons dans mon esprit!... Catherine ne peut avoir concu de
pareilles horreurs... Catherine m'aime... j'en suis sur... elle est ma
mere... ma mere!...
En parlant ainsi, Marillac avait ouvert le coffret avec une sorte de
rage desesperee.
Dans le coffret, il y avait une paire de gants
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