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comme si un grand souffle eut abattu toute cette
fureur, la foule retomba a genoux en criant:
"Miracle!... Voici le saint!..."
Le saint, c'etait frere Lubin qui, ouvrant la porte du couvent ou son
superieur l'avait rappele, la mission laique du frere etant terminee, le
moine Lubin, donc, apparaissait, les bras ouverts, la face rubiconde
et, apercevant le chevalier, s'en venait a lui, la larme a l'oeil, en
souvenir des innombrables fonds de bouteille dont Pardaillan l'avait
gratifie a la Deviniere.
"Ce digne chevalier! Ce cher ami!" begayait le moine qui passait a
travers la foule prosternee.
Maurevert et ses acolytes le suivirent en troupe. Pardaillan et Marillac
avaient profite de ce repit inespere pour rengainer leurs dagues et
mettre l'epee a la main.
Pardaillan ne se demanda pas pourquoi Maurevert se trouvait parmi
cette masse de peuple et pour quelle besogne il etait escorte de
gentilshommes, dont il en reconnut quelques-uns pour des fervents de la
reine Catherine.
--Attention! dit-il a Marillac, voici la meute... Voyez-vous, a votre
gauche, cette encoignure sous l'auvent?
--Je la vois, dit Marillac qui, de la pointe de son epee, menacait deja
un de ses assaillants.
--Allons-y d'un bond. La, nous pourrons tenir tete... Attention! Vous y
etes?
Les deux amis se fendirent ensemble: un double hurlement eclata; deux
des plus avances tomberent.
Marillac, alors, obeissant a la manoeuvre indiquee, se rua vers
l'encoignure, en fourrageant de l'epee; la foule s'ecarta avec des
clameurs et se referma sur lui. Lorsque Marillac eut atteint son poste,
il s'apercut qu'il etait seul.
--Pardaillan! rugit-il.
Et il se jeta tete baissee sur la muraille vivante.
A ce moment, il fut saisi par-derriere, paralyse, dans l'impossibilite
de faire un mouvement, souleve, entraine, emporte dans l'interieur du
couvent.
Quant au chevalier, voici ce qui etait arrive:
Au moment ou Lubin arrivait pres de lui, l'un des gentilshommes, qui
escortait Maurevert, lui porta un coup de pointe. Ce fut alors qu'il se
fendit a fond et par un coup droit, traversa l'epaule de son adversaire.
A l'instant ou il se relevait et ou il allait se jeter vers l'encoignure
qu'il avait montree a Marillac, le moine fut sur lui et l'enserra dans
ses bras, en begayant:
"C'est donc vous... Ah! que je suis heureux... Venez boire..."
D'une violente secousse, Pardaillan se debarrassa du moine, qui alla
rouler a terre en murmurant:
"L'
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