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oliers. Imaginez que, sur une classe de bambins, cinquante annees de misere, de maladie, de privations, de deboires se soient abattues, brusquement, comme un orage, et voila l'agence Barouin au travail. Un silence limoneux, fait de murmures etouffes, de toux, de respirations asthmatiques et d'un remuement de chaussures sur le plancher mouille. Aux murs pisseux, rien que le ruissellement des eaux produites par la condensation de toutes les haleines. En chaire, car il y a une chaire, quelque chose comme un adjudant, un bonhomme tout en moustaches grises, en nuque et en machoire. Pas de front: les cheveux dans les sourcils; au sein de tout ce poil, des yeux saignants, ardents, comme deux tisons dans un maquis. --Vite! Vite! me dit mon compagnon, il y a deux places, la-bas, pres de la fenetre. Nous nous assimes cote a cote, sur un bout de banc. Lhuilier ouvrit sa serviette de molesquine et en sortit deux porte-plume. --Tenez, voici pour vous. Et maintenant, venez vite demander des bandes au macaque. Le macaque etait cette maniere de sous-officier qui tronait au bout de la salle. Il me remit un petit registre et un paquet de bandes vierges. Vous n'avez, me dit Lhuilier, qu'a copier toutes les adresses du registre sur les bandes. Allez-y! J'y allai... Je ne comprenais pas tres bien ce qui m'etait arrive, ce que je faisais la. J'etais ahuri, engourdi. J'eprouvais un desir violent de me sauver, de me retrouver seul dans une rue deserte. Je me raidissais contre ce desir. Je pensais en serrant les dents: "Non! Non! tu y es, tu y resteras. Quoi? C'est le commencement de la decheance. Ce n'est que la premiere gorgee de la tasse. Avale, avale"! Surtout, je m'appliquais a ne rien laisser paraitre de mes sentiments, a n'avoir l'air etonne de rien, choque de rien. Enfin, le cours de mes reflexions n'empechait pas mes doigts de marcher: je copiais, je copiais, j'empilais les bandes remplies a ma droite, parallelement au paquet des bandes vierges. Parfois, je m'arretais pendant une seconde et levais les yeux sans oser lever la tete. L'odeur des hommes remuait et clapotait entre les tables comme la boue d'une mare dans laquelle pietinent des bestiaux. Vous n'avez peut-etre pas remarque qu'entre toutes les puanteurs naturelles, celle de l'homme est souveraine. C'est encore un signe de royaute, n'est-ce pas? L'odeur que l'on respirait la semblait un compose de maintes autres: celle de l'ecole, celle de la caserne, ce
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