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tout de suite que j'avais forme la resolution ferme, farouche, de mourir de faim plutot que de retourner jamais chez Barouin. Pour Lhuilier, j'ai honte a vous l'avouer, je le rencontre encore parfois dans ce quartier, et, des que je l'apercois de loin, je change de trottoir. Je sais qu'il ne me reconnaitra pas: il est trop myope. Et puis, et puis... je ne suis sans doute pas digne de cet homme-la. XIV J'ai ete plusieurs fois malade, et toujours assez gravement. Je pardonne a la maladie en faveur des convalescences. Vivre! Vivre! Ils me font rire, avec ce mot. C'est revivre qui est bon. C'est sans doute survivre qui serait vivre. Pendant mes convalescences, il me semble que j'ai vecu. Je dois vous dire qu'en me retrouvant chez moi, dans le fond de mon canape, dans mon refuge, j'eus une breve impression de convalescence. J'etais encore moi, c'est-a-dire Salavin, c'est-a-dire un pauvre homme; mais je n'etais plus ce que j'avais ete tout le jour: une larve, un debris, un residu. Ma mere et Marguerite m'avaient attendu pour diner. A me retrouver dans la cuisine chaude et propre, je ne pus m'empecher de gouter du bien-etre, de me detendre, de m'abandonner. --Louis, me dit ma mere, comme tu as l'air las! Je ne repondis qu'en hochant vaguement les epaules. Tete baissee, je comptais, du bout de la fourchette, quelques haricots epars sur les fleurs de la faience. Notre nourriture--inutile de vous le dire--etait des plus simples; mais elle avait un gout particulier a la cuisine de maman, un gout qu'il me serait bien impossible de vous expliquer, un gout que je reconnaitrais entre mille, comme un visage. Ma mere reprit: --Tu te fatigues trop a chercher. Il faudra prendre un peu de cafe avec nous, tout a l'heure. J'acquiescai d'un sourire: Je ne serai jamais un homme pour ma mere. Quand elle me voit triste, decourage, elle murmure: "Veux-tu un petit morceau de chocolat?" Si j'etais general et que j'eusse perdu une bataille, maman me dirait: "Ne pleure pas, mon Louis, je vais te faire une creme au caramel". L'etrange, voyez-vous? est que le bout de chocolat ou la creme au caramel possedent bien, alors, toutes les vertus que la pauvre femme leur prete. Mais, assez la-dessus! Que je vous raconte plutot une chose singuliere. Le nez dans mon assiette, j'ecoutais les menus propos de maman et je me sentais penetre d'une inquietude nouvelle, indefinissable. Je suis habitue a vivre sous le regard de ma me
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