arole.
"C'est bien le chemin de Maraucourt, n'est-ce pas?
-- Oui, tout dret.
-- Oh! tout dret, dit Perrine en souriant; il n'est pas si _dret_
que ca.
-- S'il vous emberluque, j'y vas a Maraucourt, nous pouvons faire
le k'min ensemble.
-- Avec plaisir, si vous voulez que je vous aide a porter votre
panier.
-- C'est pas de refus, y pese rud'ment."
Disant cela elle le mit a terre en poussant un ouf de soulagement.
"C'est-y que vous etes de Maraucourt? demanda-t-elle.
-- Non; et vous?
-- Bien sur que j'en suis.
-- Est-ce que vous travaillez aux usines?
-- Bien sur, comme tout le monde donc; je travaille aux
cannetieres.
-- Qu'est-ce que c'est?
-- Tiens, vous ne connaissez pas les cannetieres, les epouloirs
quoi! d'ou que vous venez donc?
-- De Paris.
-- A Paris ils ne connaissent pas les cannetieres, c'est drole:
enfin, c'est des machines a preparer le fil pour les navettes.
-- On gagne de bonnes journees?
-- Dix sous.
-- C'est difficile?
-- Pas trop; mais il faut avoir l'oeil et ne pas perdre son temps.
C'est-y que vous voudriez etre embauchee?
-- Oui; si l'on voulait de moi.
-- Bien sur qu'on voudra de vous; on prend tout le monde; sans ca
ousqu'on trouverait les sept mille ouvriers qui travaillent dans
les ateliers; vous n'aurez qu'a vous presenter demain matin a six
heures a la grille des shedes. Mais assez cause, il ne faut pas
que je sois en retard."
Elle prit l'anse du panier d'un cote, Perrine la prit de l'autre
et elles se mirent en marche d'un meme pas, au milieu du chemin.
L'occasion qui s'offrait a Perrine d'apprendre ce qu'elle avait
interet a savoir etait trop favorable pour qu'elle ne la saisit
pas; mais comme elle ne pouvait pas interroger franchement cette
jeune fille, il fallait que ses questions fussent adroites et que
tout en ayant l'air de bavarder au hasard, elle ne demandat rien
qui n'eut un but assez bien enveloppe pour qu'on ne put pas le
deviner.
"Est-ce que vous etes nee a Maraucourt?
-- Bien sur que j'en suis native, et ma mere l'etait aussi. Mon
pere etait de Picquigny.
-- Vous les avez perdus?
-- Oui, je vis avec ma grand'mere qui tient un debit et une
epicerie: Mme Francoise.
-- Ah! Mme Francoise!
-- Vous la connaissez-t'y?
-- Non... je dis ah! Mme Francoise.
-- C'est qu'elle est bien connue dans le pays, pour son debit, et
puis aussi parce que, comme elle a ete la nourrice de M. Edmond
Paindavoine, quand les gen
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