la
Mediterranee, et de l'un des plus forts du monde. Il fallait l'ascendant
de Bonaparte pour l'obtenir sans combattre; il fallait son audace
pour oser y perdre quelques jours, ayant les Anglais a sa poursuite.
Caffarelli-Dufalga, aussi spirituel que brave, en parcourant la place
dont il admirait les fortifications, dit ce mot: _Nous sommes bien
heureux qu'il y ait eu quelqu'un dans la place pour nous en ouvrir les
portes._
Bonaparte laissa Vaubois a Malte, avec trois mille hommes de garnison;
il y placa Regnault (de Saint-Jean-d'Angely), en qualite de commissaire
civil. Il fit tous les reglemens administratifs qui etaient necessaires
pour l'etablissement du regime municipal dans l'ile, et il mit
sur-le-champ a la voile pour cingler vers la cote d'Egypte.
Il leva l'ancre le 1er messidor (19 juin), apres une relache de dix
jours. L'essentiel maintenant, etait de ne pas rencontrer les Anglais.
Nelson, radoube aux iles Saint-Pierre, avait recu du lord Saint-Vincent
un renfort de dix vaisseaux de ligne et de plusieurs fregates, ce qui
lui formait une escadre de treize vaisseaux de haut bord, et de quelques
vaisseaux de moindre importance. Il etait revenu le 13 prairial (1er
juin) devant Toulon; mais l'escadre francaise en etait sortie depuis
douze jours. Il avait couru de Toulon a la rade du Tagliamon, et de la
rade du Tagliamon a Naples, ou il etait arrive le 2 messidor (20 juin),
au moment meme ou Bonaparte quittait Malte. Apprenant que les Francais
avaient paru vers Malte, il les suivait, dispose a les attaquer s'il
parvenait a les joindre.
Sur toute l'escadre francaise, on etait pret au combat. La possibilite
de rencontrer les Anglais etait presente a tous les esprits et
n'effrayait personne. Bonaparte avait reparti sur chaque vaisseau de
ligne cinq cents hommes d'elite, qu'on habituait tous les jours a la
manoeuvre du canon, et a la tete desquels se trouvait un de ces generaux
si bien habitues au feu sous ses ordres. Il s'etait fait un principe sur
la tactique maritime, c'est que chaque vaisseau ne devait avoir qu'un
but, celui d'en joindre un autre, de le combattre et de l'aborder. Des
ordres etaient donnes en consequence, et il comptait sur la bravoure des
troupes d'elite placees a bord des vaisseaux. Ces precautions prises, il
cinglait tranquillement vers l'Egypte. Cet homme qui, suivant
d'absurdes detracteurs, craignait les hasards de la mer, s'abandonnait
tranquillement a la fortune, au milieu des flottes an
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