t, Herbert et Gilbert, de l'autre, etaient en
presence, a la tete de forces considerables. Une grande bataille
semblait imminente. Mais avec cet esprit a la fois politique, un peu
indecis et humanitaire qui caracterisait les acteurs de ces guerres
civiles, on entra en pourparlers pour eviter une effusion de sang
inutile, on discuta et on s'entendit pour conclure un armistice
jusqu'au 1er octobre[230]. Peut-etre aussi Gilbert avait-il ete retenu
par le scrupule de combattre son ancien suzerain, au moment ou il
n'existait aucun trouble dans les relations entre celui-ci et Henri de
Germanie, son nouveau maitre.
A quelque temps de la, la garnison remoise d'Herbert viola la treve en
allant attaquer et detruire la forteresse de Braisne-sur-la-Vesle[231],
que Hugues avait enlevee naguere a l'archeveque de Rouen, Gonthard.
Raoul se decida alors a tenter un effort energique contre la grande
cite metropolitaine, veritable centre de la resistance du parti
vermandois. Il essaya sans resultat d'entamer des negociations avec
le clerge et les habitants de Reims, afin d'obtenir, par leur
initiative, la nomination d'un veritable archeveque a la place du
jeune expectant Hugues. Ses demarches echouerent parce qu'Herbert
avait reussi a s'attacher les Remois par d'habiles largesses. Raoul
n'hesita plus a se porter en avant, avec toute son armee jointe a
celle de Hugues, sur Laon et Reims[232].
A son approche se manifesterent les defections. Artaud, moine de
Saint-Remy, alla trouver Hugues, et par son attitude nettement hostile
a Herbert sut gagner ses bonnes graces, dont il devait un peu plus
tard apprecier toute la valeur[233].
Herbert, reduit aux abois, ne trouva d'autre moyen d'echapper a une
capitulation desastreuse que de se reclamer de la suzerainete
germanique. Il retourna pres du roi Henri, en Lorraine, et lui preta
de nouveau l'hommage. Mais Raoul le surveillait, sachant bien ce dont
il etait capable. Il se rendit jusqu'a Attigny, d'ou il envoya Hugues
en ambassade au roi Henri. Le roi de Germanie fut naturellement plus
sensible a cette demarche de conciliation d'un rival puissant qu'a
celle d'un seigneur discredite et sans ressources[234]. Il n'etait pas
dispose a profiter des avances d'un allie douteux, pour tenter une
intervention hasardeuse dans les querelles intestines d'un pays dont
le souverain ne lui temoignait aucune hostilite. Henri et Raoul se
consideraient tous les deux comme "rois des Francs" (_reges
Francorum_)
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