ettre hors de pair. Dans les
nombreuses luttes qu'il eut a soutenir, il paya toujours de sa
personne, et il fut grievement blesse en combattant les Normands. Il
semble meme, a dire vrai, que son audace soit allee souvent jusqu'a la
temerite, et que son instinct guerrier une fois dechaine ne fut pas
exempt d'une certaine cruaute.
S'il se montra d'une bravoure accomplie en un siecle ou la vaillance
etait la premiere des vertus, il n'en posseda pas moins a un haut
degre les qualites necessaires pour gouverner. Il etait verse dans les
lettres[299]. Les chroniqueurs contemporains ont loue sa devotion et
sa generosite envers les eglises, ce qui, sous la plume d'ecrivains
ecclesiastiques, signifie qu'il sut faire des largesses utiles a son
influence et comprit les necessites materielles de son temps. Les
abbayes de Sainte-Colombe de Sens et de Saint-Germain d'Auxerre, dont
il etait avoue, les eglises d'Autun, d'Auxerre[300] et d'Orleans[301],
les abbayes de Saint-Martin de Tours[302], de Saint-Benoit-sur-Loire[303],
de Tulle[304] et de Cluny[305] furent comblees de ses dons. Il se montra
toujours protecteur de la justice et de l'ordre, suivant les traditions
de son pere Richard, qu'on a precisement surnomme le "Justicier"[306].
Aussi est-ce a lui que s'adressa le pape Jean X pour faire restituer a
l'abbaye de Cluny les domaines occupes par Guy, abbe de Gigny, en
violation du testament de Bernon[307].
Toujours pret a combattre contre des difficultes sans cesse
renaissantes, il deploya une admirable activite, pendant les douze
annees que dura son regne. Sa fermete, sa constance et aussi son
savoir-faire se trouvent amplement deceles par les circonstances de sa
vie. Il est loin d'egaler le politique sans scrupule qu'est Herbert de
Vermandois; mais il sait se tracer une ligne de conduite et executer,
malgre les obstacles, un plan arrete a l'avance. La maniere dont il se
servit de son frere Boson, en Lorraine et en Provence, et les phases
diverses de sa lutte contre Herbert, admirablement menee apres
quelques hesitations au debut, en apportent la demonstration la plus
limpide.
On a tres justement mis en parallele Raoul avec ses contemporains, les
souverains allemands Conrad de Franconie et Henri de Saxe, et on a
observe que la comparaison ne lui etait en rien defavorable[308]. S'il
fut moins heureux que le second, dont le fils Otton le Grand put
recueillir l'heritage et l'accroitre, du moins arriva-t-il a faire
reconnaitre p
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