le soudan, et il y demeure plusieurs Maures.
Elle est defendue par un chateau, par des fosses a glacis et par une double
enceinte de murailles, qui en certains endroits est triple. Une petite
riviere la traverse, et a peu de distance il en coule une autre.
J'y trouvai un marchand de Cypre, nomme Antoine, qui depuis long-temps
demeuroit dans le pays et en savoit bien la languei. Il m'en parla
pertinemment; mais il me fit un autre plaisir, celui de me donner de bon
vin, car depuis plusieurs jours je n'en avois point bu.
Tharse n'est qu'a soixante milles du Korkene (Curco), chateau construit sur
la mer, et qui appartient au roi de Cypre.
Dans tout ce pays on parle Turc, et on commence meme a le parler des
Antioche, qui est, comme je l'ai dit, la capitale de Turcomanie. "C'est un
tres-beau langaige, et brief, et bien aisie pour aprendre."
Comme nous avions a traverser les hautes montagnes d'Armenie, Hoyarbarach,
le chef de notre caravane, voulut qu'elle fut toute reunie; et dans ce
dessein il attendit quelques jours. Enfin nous partimes la veille de la
Toussaint. Le mamelouck m'avoit conseille de m'approvisioner pour quatre
journees. En consequence j'achetai pour moi une provision de pain et de
fromage, et pour mon cheval une autre d'orge et de paille.
Au sortir de Tharse je fis encore trois lieues Francaises a travers un beau
pays de plaines, peuple de Turcomans; mais enfin j'entrai dans les
montagnes, montagnes les plus hautes que j'aie encore vues. Elles
enveloppent par trois cotes tout le pays que j'avois parcouru depuis
Antioche. L'autre partie est fermee au midi par la mer.
D'abord on a des bois a traverser. Ce chemin dure tout un jour, et il n'est
pas malaise. Nous logeames le soir dans un passage etroit ou il me parut
que jadis il y avoit eu un chateau. La seconde journee n'eut point de
mauvaise route encore, et nous vinmes passer la nuit dans un caravanserai.
La troisieme, nous cotoyames constamment une petite riviere, et vimes dans
les montagnes une multitude immense de perdrix griaches. Notre halte du
soir fut dans une plaine d'environ une lieue de longueur sur un quart de
large.
La se rencontrent quatre grandes combes (vallees). L'une est celle par
laquelle nous etions venus; l'autre, qui perce au nord, tire vers le pays
du seigneur, qu'on appelle Turcgadirony, et vers la Perse; la troisieme
s'etend au Levant, et j'ignore si elle conduit de meme a la Perse; la
derniere enfin est au couchant, et c'e
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