laquelle fut attache Notre-Seigneur pour etre battu de verges chez Pilate.
Ce morceau, plus grand que la hauteur d'un homme, est de la meme pierre que
deux autres que j'ai vus, l'une a Rome, l'autre a Jerusalem; mais ce
dernier excede en grandeur les deux autres ensemble.
Il y a encore dans la meme eglise, et dans des cercueils de bois, plusieurs
corps saints qui sont entiers: les voit qui veut. L'un d'eux avoit eu la
tete coupee; on lui en a mis une d'un autre saint Au reste les Grecs ne
portent point a ces reliques le meme respect que nous. Il en est de meme
pour la pierre de Nichodeme et la colonne de Notre-Seigneur: celle-ci est
seulement couverte d'une enveloppe en planches, et posee debout pres d'un
pilier, a main droite quand on entre dans l'eglise par la porte de devant.
Parmi les belles eglises je citerai encore comme une des plus remarquables
celle qu'on nomme la Blaquerne, parce-qu'elle est pres du palais imperial,
et qui, quoique petite et mal couverte, a des peintures avec pave et
revetemens en marbre. Je ne doute pas qu'il n'y en ait plusieurs autres
egalement dignes d'etre vantees; mais je n'ai pu les visiter toutes. Les
marchands (marchands Latins) en ont une ou tous les jours on dit la messe a
la romaine. Celle-ci est vis-a-vis le passage de Pera.
La ville a des marchands de plusieurs nations; mais aucune n'y est aussi
puissante que les Venitiens. Ils y ont un baille (baile) qui connoit seul
de toutes leurs affaires, et ne depend ni de l'empereur ni de ses
officiers. C'est-la un privilege qu'ils possedent depuis longtemps:
[Footnote: Depuis la conquete de l'empire d'Orient par les Latins, en 1204,
conquete a laquelle les Venitiens avoient contribue en grande partie.] on
dit meme que par deux fois ils ont, avec leurs galeres, sauve des Turcs la
ville; pour moi je croy que Dieu l'a plus gardee pour les saintes reliques
qui sont dedans que pour autre chose.
Le Turc y entretient aussi un officier pour le commerce qu'y font ses
sujets, et cet officier est, de meme que le baile, independant de
l'empereur; ils y ont meme le droit, quand un de leurs esclaves s'echappe
et s'y refugie, de le redemander, et l'empereur est oblige de le leur
rendre.
Ce prince est dans une grande sujetion du Turc, puisque annuellement il lui
paie, m'a-t-on dit, un tribut de dix mille ducats; et cette somme est
uniquement pour Constantinople: car au-dela de cette ville il ne possede
rien qu'un chateau situe a trois lieues ve
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