uis, lorsque le dernier d'entre nous
s'endormit, le pretre agenouille priait encore.
Le lendemain, le soleil radieux s'elevait a peine de l'horizon que nous
etions sur pieds. La messe sonnait, nous nous y rendimes.
Je ne sais quel charme cet homme de bien repandait sur tout ce qu'il
faisait ou disait; mais la messe entendue, nous sentions au dedans de
nous un calme, une paix et un bonheur intimes que je n'ai peut-etre
jamais eprouves depuis. Le dejeuner se se ressentit de notre disposition
d'esprit, il fut gai et petillant de bons mots; puis havre-sacs sur le
dos, nous primes, en chantant de gais refrains, le chemin des grands
bois.
LE VOYAGE
Tout alla pour le mieux pendant les premiers six milles, mais a mesure
que le soleil s'elevait, la chaleur devenait de plus en plus forte, et
vers midi, l'air etait suffocant. Les moustiques, cette journee-la,
s'etaient lies pour soutirer le droit de passage; aussi, fallut-il que
chacun du nous leur payat un tribut; a vrai dire, ils etaient encore
plus avides que certains douaniers auxquels vous n'avez pas donne un
bonus. Les enflures et les demangeaisons insupportables, que leurs
piqures nous causaient, faisaient presque regretter d'etre venus si
loin chercher le plaisir. De plus, les sources d'eau que nos guides
s'attendaient a rencontrer sur notre route, etaient taries en
consequence de la secheresse exceptionnelle de l'ete.
Vers quatre heures de l'apres midi, nos gosiers etaient arides, nos
palais desseches et nos estomacs criaient famine. Depuis le matin, nous
n'avions que grignote par ci par la quelques morceaux de biscuits, tout
en marchant. Malgre l'assurance que nos guides nous donnaient, que nous
n'etions plus qu'a deux milles de la chute; nous allions faire halte,
lorsque la grosse voix de Baptiste, notre premier guide, se fit
entendre. Il avait pris les devants depuis quelque temps, et jamais
refrain plus agreable parvint a nos oreilles. A boire, a boire, qui donc
en voudra boire chantait-il en meme temps qu'il se montra portant une
enorme gourde bien remplie. Apres que nous eumes avidement vide le
contenu de cette bienfaisante gourde et pris quelques minutes de repos,
nous nous remimes en route rafraichis et reconfortes. Les guides
entonnerent les gais chants des voyageurs canadiens, ensemble nous fimes
chorus. Point ai-je besoin de dire que ces chants n'eussent pas ete
admis au Conservatoire de Paris.
Enfin haletants, fatigues, meconnaissables par
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