aveur.
"Je parus rarement; et la conduite que je tins dans cette position tres
delicate entre l'ancienne municipalite, qui reclamait contre sa
destitution, et la nouvelle, qui se pretendait legalement instituee, ne
fut pas inutile a la tranquillite publique; car, si alors je me fusse
prononce fortement pour ou contre, j'occasionnais un dechirement qui
aurait pu avoir des suites funestes: en tout il est un point de maturite
qu'il faut savoir saisir.
"L'administration fut negligee, le maire ne fut plus un centre d'unite;
tous les fils furent coupes entre mes mains; le pouvoir fut disperse;
l'action de surveillance fut sans force; l'action reprimante le fut
egalement.
"Robespierre prit donc l'ascendant dans le conseil, et il etait difficile
que cela ne fut pas ainsi dans les circonstances ou nous nous trouvions,
et avec la trempe de son esprit. Je lui entendis prononcer un discours qui
me contrista l'ame: il s'agissait du decret qui ouvrait les barrieres, et
a ce sujet il se livra a des declamations extremement animees, aux ecarts
d'une imagination sombre; il apercut des precipices sous ses pas, des
complots liberticides; il signala les pretendus conspirateurs; il
s'adressa au peuple, echauffa les esprits, et occasionna, parmi ceux qui
l'entendaient, la plus vive fermentation.
"Je repondis a ce discours pour retablir le calme, pour dissiper ces
noires illusions, et ramener la discussion au seul point qui dut occuper
l'assemblee.
"Robespierre et ses partisans entrainaient ainsi la commune dans des
demarches inconsiderees, dans les partis extremes.
"Je ne suspectais pas pour cela les intentions de Robespierre; j'accusais
sa tete plus que son coeur; mais les suites de ces noires visions ne m'en
causaient pas moins d'alarmes.
"Chaque jour les tribunes du conseil retentissaient de diatribes
violentes; les membres ne pouvaient pas se persuader qu'ils etaient des
magistrats charges de veiller a l'execution des lois et au maintien de
l'ordre; ils s'envisageaient toujours comme formant une association
revolutionnaire.
"Les sections assemblees recevaient cette influence, la communiquaient a
leur tour; de sorte qu'en meme temps tout Paris fut en fermentation.
"Le comite de surveillance de la commune remplissait les prisons; on ne
peut pas se dissimuler que si plusieurs de ces arrestations furent justes
et necessaires, d'autres furent legalement hasardees. Il faut moins en
accuser les chefs que leurs agens: la poli
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