vent l'yver: Et de ce font grant amas comme
avons veu par experience. Tout leur vivre est sans aucun goust de sel:
Et couchent sur escorces de boys estandues sur la terre avec meschantes
peaulx de bestes sauvaiges, dequoy font leur vestement & couverture. La
plus precieuse chose qu'ilz ayent en ce monde, est Esurgny, lequel est
blanc comme neif, & le prennent audit fleuve en cornibotz en la maniere
qui ensuyt. Quand ung homme a desservi mort, ou qu'ilz ont prins aucuns
ennemys a la guerre ilz le tuent, puis l'incisent par les fessens,
cuysses, & espaulles a grandes taillades puis au lieu ou est ledict
Esurgny, avallent ledict corps au fond de l'eaue & le laissent dix
ou douze heures, puis le retirent a mont & treuvent dedans lesdictes
taillades & inciseures lesdictz cornibotz, desquelz ilz font manieres
de patenostre, & de ce usent comme nous faisons d'or & d'argent, & le
tiennent la plus precieuse chose du monde. Il a vertu d'estancher le
sang des nazilles: car nous l'avons experimente. Tout cedict peuple ne
s'adonne que a labourage & pescherie pour vivre: Car des biens [Page 25]
de ce monde n'en font compte, parce qu'ilz n'en ont congnoissance, &
qu'ilz ne bougent de leur pais, & ne sont ambulataires comme ceulx de
Canada, & du Saguenay, nonobstant que lesdictz Canadiens leur soyent
subgectz avec huict ou neuf autres peuples, qui sont sur ledict fleuve.
_Comment nous arrivasmes a ladicte ville, & de la reception que nous
y fut faicte, & comme le cappitaine leur feist des presens: & aultres
choses comme sera veu en ce chapitre_.
Apres que feusmes arrivez au pres d'icelle ville, se rendirent au devant
de nous grand nombre des habitans d'icelle, qui a leur facon de faire
nous feirent bon racueil: & par noz guydes & conducteurs feusmes menez
au meilleu d'icelle ville, ou il y a une place entre les maisons,
spacieuse d'ung gect de pierre en carre ou environ: lesquelz nous
feirent signe que nous arrestions audict lieu. Et tout soudain
s'assemblerent les filles et femmes de ladicte ville, dont l'une partye
estoient chargez d'enfans entre les bras, & qui nous vindrent frotter
le visaige, bras & autres endroictz de dessus le corps ou ilz pouvoient
toucher, pleurant de joye de nous veoir, en nous faisant le meilleure
chere qu'il leur estoit possible, nous faisans signes qu'il nous pleust
toucher a leursdictz enfans. Apres lesquelles choses les hommes feirent
retirer les femmes & se assirent sur la terre a lentour de nous, c
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