des de la reclame, les
hableries du bulletin biographique, et jusqu'aux puissantes machines
appelees claqueurs. Il y avait de fortes brigues, d'ardentes cabales;
mais tout cela s'elaborait dans les coteries, et s'operait par la seule
force d'un public engoue naivement des uns, hostile sincerement aux
autres. L'art n'etait pas toujours le mobile. De petites et de grandes
passions, etrangeres a l'art et au talent, venaient bien, comme
aujourd'hui, batailler dans le temple. Mais on etait moins habile a
cacher ces causes de discorde, et a les mettre sur le compte d'un
dilettantisme severe. Enfin c'etait le meme fond aussi vulgairement
humain, avec une surface moins compliquee par la civilisation.
Zustiniani menait ces sortes d'affaires en grand seigneur plus qu'en
directeur de spectacle. Son ostentation etait un moteur plus puissant
que la cupidite des speculateurs ordinaires. C'etait dans les salons
qu'il preparait son public, et _chauffait_ les succes de ses
representations. Ses moyens n'etaient donc jamais bas ni laches; mais il
y portait la puerilite de son amour-propre, l'activite de ses passions
galantes, et le commerage adroit de la bonne compagnie. Il allait donc
demolissant piece a piece, avec assez d'art, l'edifice eleve naguere de
ses propres mains a la gloire de Corilla. Tout le monde voyait bien
qu'il voulait edifier une autre gloire; et comme on lui attribuait la
possession complete de cette pretendue merveille qu'il voulait produire,
la pauvre Consuelo ne se doutait pas encore des sentiments du comte pour
elle, que deja tout Venise disait que, degoute de la Corilla, il faisait
debuter a sa place une nouvelle maitresse. Plusieurs ajoutaient: "Grande
mystification pour son public, et grand dommage pour son theatre! car sa
favorite est une petite chanteuse des rues qui ne sait _rien_, et ne
possede rien qu'une belle voix et une figure passable."
De la des cabales pour la Corilla, qui, de son cote, allait jouant le
role de rivale sacrifiee, et invoquait son nombreux entourage
d'adorateurs, afin qu'ils fissent, eux et leurs amis, justice des
pretentions insolentes de la _Zingarella_ (petite bohemienne). De la
aussi des cabales en faveur de la Consuelo, de la part des femmes dont
la Corilla avait detourne ou dispute les amants et les maris, ou bien de
la part des maris qui souhaitaient qu'un certain groupe de Don Juan
venitiens se serrat autour de la debutante plutot qu'autour de leurs
femmes, ou bien encore de
|