e maitre des temps et des evenements, et qui en
cache la connaissance ou bien la donne a qui bon lui semble."
On concoit la reserve de M. Dollier de Casson, pretre de Saint-Sulpice,
parlant d'un de ses confreres; cette reserve est bien naturelle et
pleine de delicatesse.
Quoi qu'il en soit, d'ailleurs, des circonstances merveilleuses qui
accompagnerent et suivirent la mort de M. Le Maitre; que l'on veuille
ou non admettre comme miraculeux les faits que nous venons de raconter,
d'apres les ecrits des contemporains, on n'en doit pas moins regarder M.
Le Maitre comme un martyr. Sa mort a ete prompte, il est vrai; il n'a eu
a subir de la part de ses assassins ni supplices, ni tortures; mais ce
qui constitue le martyre ce n'est pas la longueur plus ou moins grande
des souffrances endurees, ce n'est pas la cruaute plus ou moins raffinee
des bourreaux; c'est la volonte de donner sa vie pour sa foi, pour son
Dieu. M. Le Maitre avait cette volonte; il brulait du desir d'etre
envoye au Canada pour travailler a la conversion des sauvages et, des le
premier jour, il avait fait le sacrifice complet de sa vie pour gagner a
Notre-Seigneur ces barbares idolatres.
IV
MARTYRE DE M. VIGNAL, 27 OCTOBRE 1661.
Bien peu de temps--deux mois a peine--apres que M. Jacques Le Maitre eut
recu la couronne du martyre, la compagnie de Saint-Sulpice et la colonie
furent de nouveau cruellement eprouvees par le massacre de M. Vignal,
pretre de Saint-Sulpice.
Comme nous l'avons deja dit, M. Vignal etait arrive a Montreal en meme
temps que M. Le Maitre vers la fin de septembre 1659, et, comme lui "il
recut la mort de la main de ceux pour lesquels il avait voulu souvent
donner sa vie."
Ayant succede comme econome a M. Le Maitre, M. Vignal s'empressa de
faire continuer la batisse qui devait servir de logement aux Messieurs
de Saint-Sulpice. Ceux-ci, depuis leur arrivee a Montreal, etaient loges
provisoirement a l'Hotel-Dieu, et en cette annee 1661, ils faisaient
batir, en face du fleuve, la maison du seminaire. Pour hater son
achevement, M. Vignal obtint de M. de Maisonneuve l'autorisation d'aller
avec quelques hommes chercher des pierres dans une petite ile appelee
_l'Ile-a-la-Pierre_, situee au-dessus de l'ile Sainte-Helene, justement
vis-a-vis le port de Montreal.
Des que M. Vignal eut obtenu l'autorisation de M. de Maisonneuve il ne
songea qu'a s'embarquer promptement sans se preoccuper des Iroquois dont
pourtant on avait signale
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