la presence dans l'ile, et, a peine arrives,
lui et ses compagnons allerent insouciamment a leur travail qui d'un
cote, qui de l'autre, sans avoir meme la precaution de prendre leurs
armes avec eux. "Un d'entre eux, dit M. Dollier de Casson, qui ne fut
pas le moins surpris, alla vaquer a ses necessites, se mettant sur le
bord de l'embuscade des ennemis, auxquels il tourna le derriere. Un
Iroquois, indigne de cette insulte, sans dire un mot, le piqua d'un coup
de son epee. Cet homme qui n'avait jamais eprouve de seringue si vive et
si pointue, fit un bond en recevant cette piqure, et se mit a courir
a _la voile_ vers ses compagnons. Ceux-ci virent de suite l'ennemi et
l'entendirent faire une grosse huee, ce qui effraya tellement nos gens
dont une partie n'etait pas encore debarquee, que tous generalement ne
songerent qu'a s'enfuir, s'oubliant ainsi de leur bravoure ordinaire."
Malheureusement, le chef de cette petite troupe Claude de Brigeac, jeune
gentilhomme de 30 ans, "venu a Villemarie comme soldat, par pur motif de
religion, dans l'intention d'y sacrifier sa vie pour l'etablissement
de l'eglise catholique," et dont M. de Maisonneuve avait fait son
secretaire particulier, n'etait pas encore debarque.
En voyant l'epouvante et la deroute des Francais il se jette a terre
en encourageant ses hommes a la resistance. Ces exhortations ne
produisirent aucun effet sur ces soldats epouvantes, gui ne seconderent
nullement les efforts de leur chef, et laisserent ainsi la victoire aux
Iroquois.
Quoique seul, M. de Brigeac par sa fiere attitude effraya les sauvages
et les arreta pendant quelque temps: ce qui permit aux Francais de fuir
et les empecha d'etre tous faits prisonniers. Mais bientot les ennemis
voyant M. de Brigeac tout seul, devinrent plus courageux et se jeterent
sur lui. Ce brave, conservant tout son sang-froid, ajuste le capitaine
des Iroquois et le tue d'un coup de fusil. Cette mort effraya tellement
les autres sauvages que pendant quelques instants, ils hesiterent a
affronter le coup de pistolet que M. de Brigeac avait encore a tirer.
Cependant, honteux d'etre tenus en echec par un seul homme, ils font sur
lui une decharge qui lui casse le bras droit et fait tomber le pistolet
qu'il tenait a la main. Il parait qu'il eut assez de courage pour le
reprendre, et qu'il ne cessait de le leur presenter quoiqu'il eut le
bras rompu. Mais n'ayant pas la force de le tirer, il se jette a l'eau;
les Iroquois s'y jettent
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